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Alors que s’est tenu au Sénat mardi 10 janvier 2023, à la demande du groupe LR, un débat sur l’instauration des ZFE et que l’Assemblée nationale examine jeudi la proposition de loi du RN visant à supprimer ce dispositif, l’entourage du ministre de la Transition écologique défend la création de ces zones pour améliorer la qualité de l’air, et la "liberté presque totale" laissée aux collectivités pour leur mise en œuvre. Admettant un "défaut de pédagogie" sur la mesure, Christophe Béchu assure, devant les sénateurs, vouloir lancer une campagne nationale de communication au second semestre.
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Le gouvernement va lancer une campagne nationale de communication pour rappeler "la finalité" des ZFE, lutter contre la pollution de l'air. Droits réservés - DR
"Vous ne pouvez pas dire 'c’est pas moi, c’est l’autre'" : prononcée par la sénatrice Christine Lavarde (LR, Hauts-de-Seine) à l’issue d’un débat sur l’instauration des ZFE organisé, mardi 10 janvier, à la demande de son groupe, cette phrase illustre la position avec laquelle flirte le gouvernement, à savoir renvoyer la balle dans le camp des collectivités, leur laissant ainsi porter la responsabilité politique de la mise en place de ces zones.
Le matin même, constatant qu’il y avait "parfois des informations partiellement vraies ou carrément erronées", l’entourage de Christophe Béchu expliquait vouloir faire un "rappel des éléments factuels", en particulier pour que soit bien opérée la "distinction entre ce que l’État impose et ce qui revient aux collectivités". Celles-ci disposent d’une "liberté presque totale" pour fixer les modalités d’application des zones à faibles émissions, souligne le cabinet du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, reconnaissant un dispositif "complexe".
"Marges de manœuvre totale"
En l’occurrence, trois "couches d’obligation" se superposent, rappelle-t-il : l’État impose d’une part à 43 agglomérations de plus de 150 000 habitants de mettre en place, d’ici à 2025, une ZFE couvrant au minimum la moitié de la population de l’intercommunalité. "Une obligation assortie d’aucune autre", la collectivité pouvant décider des contours de cette zone, les types de véhicules ou vignettes Crit’air concernés, les dérogations, etc.
Paru au Journal officiel du 24 décembre (lire sur AEF info), le décret n° 2022-1641 prévoit deux cas dans lesquels ces agglomérations peuvent déroger à l’obligation d’instaurer une ZFE : si la qualité de l’air est "vraiment bonne" pendant trois des cinq dernières années (les seuils retenus étant ceux de l’OMS), ou si la collectivité démontre que les actions alternatives qu’elle met en place auront des résultats équivalents, en termes de qualité de l’air, à ceux d’une ZFE. Pour l’heure, aucune agglomération n’a demandé de dérogation pour ce dernier motif, et "moins d’une dizaine" devrait l’obtenir pour le premier motif.
Deuxième "couche d’obligation", fixée par la LOM : dix métropoles (1) doivent d’ores et déjà mettre en place une telle zone, "là encore avec les mêmes marges de manœuvre totale sur le type de ZFE mobilité qui est imposé". Enfin, un calendrier "plus précis et plus contraignant" s’impose aux agglomérations dont l’air est "particulièrement dégradé" et qui sont concernées par un dépassement des seuils européens en matière de dioxyde d’azote et de particules fines. Les automobiles (et non les poids lourds ou véhicules utilitaires légers) possédant une vignette Crit’air 5 y sont interdites en 2023, les Crit’air 4 le seront en 2024 et les Crit’air 3 en 2025.
Cinq sont dans cette situation aujourd’hui (2), et la liste devrait, d’ici à 2025, se restreindre à Paris, Lyon et Marseille, qui resteraient concernées par des dépassements, estime l’entourage du ministère. Lequel souligne "qu’en raison de ces dépassements, la France est condamnée à une astreinte à ce stade de 10 M€ par semestre par le Conseil d’État et est aussi sous le coup d’une procédure au niveau européen, qui pourrait également lui faire risquer une amende".
"campagne nationale d’information et de pédagogie"
Et c’est avant tout pour cette raison que sont mises en place les ZFE, affirme Christophe Béchu devant les sénateurs, reconnaissant qu’elles ont fait l’objet d’un "défaut de pédagogie". Elles "ne visent pas en elles-mêmes à réduire la circulation des voitures, mais celle des véhicules polluants", elles "visent au remplacement des moteurs, et non pas à une diminution du parc", développe le ministre, mentionnant au passage les 48 000 décès annuels liés à la pollution atmosphérique. Il fait savoir qu’une "campagne nationale d’information et de pédagogie" sera lancée au deuxième trimestre 2023, pour "rappeler la finalité de la mesure en ne la laissant pas dépeindre comme étant à forte exclusion, même si c’est un risque si on ne l’accompagne pas".
"À la démagogie" dont font preuve les groupes LFI et RN (qui demandent la suspension de la mesure pour l’un, et sa suppression pour l’autre), "nous allons répondre par la communication", explique l’entourage du ministre, qui entend ainsi "remettre le débat dans le bon sens" et "ne pas laisser certaines idées prospérer".
Deux groupes de travail
Cette campagne sera également l’occasion de rappeler les différentes aides mises en place par le gouvernement : prêt à taux zéro, surprime à la conversion, bonus écologique, micro-crédit, et bientôt leasing pour l’acquisition de véhicules électriques, liste le ministre (lire sur AEF info).
Un groupe de travail dédié à l’acceptabilité sociale des ZFE, annoncé dès le mois d’octobre dernier lors du premier comité de suivi de ces zones (lire sur AEF info), se réunira pour la première fois jeudi 12 janvier, date à laquelle sera aussi nommé "l’interlocuteur unique" sur le sujet. Piloté par Jean-Luc Moudenc (président de Toulouse métropole) et Anne-Marie Jean (vice-présidente de l’eurométropole de Strasbourg), le groupe de travail va "réfléchir, à partir d’un territoire qui les met en œuvre, aux mesures sociales dont on a besoin" pour faciliter cette acceptabilité, indique Christophe Béchu. Le dispositif mis en place à Strasbourg, qui autorise tout véhicule à circuler au sein de la ZFE 20 jours par an, sera particulièrement examiné. Un deuxième groupe de travail, qui associera des élus et des représentants des professionnels, se penchera sur la question de l’harmonisation des ZFE. L’aboutissement de leurs réflexions est attendu pour juin.
Là encore, "il ne s’agit pas pour l’État de reprendre la main pour imposer tel ou tel paramètre", assure l’entourage du ministre, qui assure travailler avec les territoires et les présidents de métropole, de droite ou de gauche, pour "adapter [les ZFE] terrain par terrain". Interrogé à plusieurs reprises par les sénateurs sur le soutien du gouvernement aux artisans, Christophe Béchu a rappelé qu'"aucune obligation n’[était] instaurée par le gouvernement pour les véhicules utilitaires" et qu’il ne "pouss[ait] pas à accélérer le calendrier". "Si les collectivités ont décidé d’aller plus vite, il faut les accompagner", rétorque Christine Lavarde, car "l’enjeu de santé humaine nous concerne tous".
Christophe Béchu a par ailleurs rappelé que les territoires concernés par les ZFE pourraient bénéficier du fonds vert, créé par la LFI 2023, à hauteur de 150 M€ : les collectivités concernées par un dépassement de seuils "vont toucher 15 M€", celles mettent en place une ZFE sans être en dépassement 6 M€, et celles qui ont un projet de ZFE 1 M€, précise le ministre.
Constatant que "la ZFE est dans une impasse, en raison d’un manque de volonté des décideurs et de lacunes intrinsèques à la mesure", le directeur général de Respire, Tony Renucci, appelle à "réfléchir à une autre méthode et améliorer la proposition actuelle" pour "réinventer la ZFE". Pour cela, l’association annonce, mercredi 11 janvier, qu’elle lance avec Clean Cities et La Fabrique des mobilités une mission de six mois devant aboutir à un livre blanc. Celui-ci proposera "des mesures concrètes visant à améliorer l’acceptabilité sociale des ZFE tout en garantissant leur efficacité", promettent les trois organisations.
Le sujet est aussi à l’ordre du jour du Pacte du pouvoir de vivre, qui vient de se constituer en association (lire sur AEF info).
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Emilie Buono,
journaliste