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Près de quatre ans après la promulgation de la loi "Avenir professionnel", les évaluations réalisées par les pouvoirs publics mettent principalement l’accent sur la réussite quantitative portée par la hausse du nombre d’apprentis et du recours au CPF. Une approche jugée trop restrictive par Vincent Cibois, consultant-juriste chez Confluo. Dans une tribune publiée conjointement par AEF info et le Synofdes, il plaide pour une approche plus globale de l’évaluation qui embarque à la fois la construction de la norme, les effets de la réforme et les évolutions du droit de la formation.
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Vincent Cibois, consultant-juriste chez Confluo Droits réservés - DR
"Après l'Acte I dédié à la réglementation et au déploiement de la réforme de 2018 et l'Acte I bis à ses ajustements, le temps semble venu aujourd'hui de se questionner et de diagnostiquer réellement et précisément le secteur [de la formation professionnelle] et sa politique publique, et ce, avant tout Acte II (régulation)." Dans une tribune publiée conjointement par AEF info et le Synofdes, Vincent Cibois, consultant-juriste chez Confluo, appelle à la réalisation d'une réelle évaluation de la loi "Avenir professionnel" et de ses différents effets sur le système de formation professionnelle et ses acteurs, mais aussi sur le droit de la formation.
Une demande qui rejoint celle formulée par le Synofdes dans son "plaidoyer" diffusé fin avril 2022 et portant neuf propositions destinées à renforcer l'action des entreprises de formation (lire sur AEF info).
Dépasser l'approche quantitative
Vincent Cibois construit sa proposition en complément -voire en opposition- de l'approche quantitative des évaluations de la loi "Avenir professionnel" déjà réalisées, mais aussi de la communication autour de cette dernière. "S'il ne semble plus nécessaire de démontrer l'engouement que la réforme de 2018 a produit, il est criant de relever que son évaluation s'est principalement focalisée, à ce jour, sur des résultats chiffrés. Sa communication également", souligne-t-il ainsi. S'il considère que les chiffres "sont nécessaires", le juriste estime également qu'ils "ne peuvent toutefois constituer le seul indicateur et le seul critère d'évaluation de la politique publique".
De même, Vincent Cibois regrette que le rapport parlementaire d'évaluation de la loi "souffre du manque d'analyses juridiques, économiques, financières, sociales et environnementales" de ses effets. Autant de constats qui l'amènent à plaider pour "une évaluation réelle de la réforme de 2018, dépassant l'approche quantitative". Une démarche déjà entamée au travers de certains travaux menés par France compétences, la Dares, certaines régions ou même les partenaires sociaux, reconnaît-il.
Pour une évaluation globale
Pour le juriste, il est nécessaire de réfléchir à "une évaluation globale de la politique publique, de sa construction à son application". En premier lieu, il considère que "la conception de la réforme mériterait d'été évaluée ex post", ne serait-ce qu'en raison d'une ambition initiale "de réunir apprentissage, formation professionnelle, assurance chômage et mesures d'emploi", qui "semble souffrir de son imprécision". Un avis qu'il appuie à la fois sur les lacunes de l'étude d'impact de la loi du 5 septembre 2018 pointées à plusieurs reprises mais aussi sur les modifications apportées "par cinq saisines rectificatives du Conseil d'État". Au final, Vincent Cibois juge que "cette construction normative est à interroger tant la loi votée in fine ne ressemble plus au dépôt de son projet [...] et tant la méthode de rédaction de cette loi peut se discuter".
De même, il plaide pour "une évaluation d'impact de la politique publique" à la suite du déploiement de la réforme de 2018. Une étape indispensable en raison "des ajustements" qui ont eu lieu, que ce soit en raison de la crise sanitaire ou qu'ils soient "davantage inhérents à la loi de 2018" elle-même. Vincent Cibois envisage que cet exercice permette notamment de déterminer, parmi les "réussites quantitatives" de la loi "Avenir professionnel", celles qui "peuvent être au bénéfice direct et seul de la réforme de 2018". Sur ce point, il cite en particulier le cas de "l'augmentation du nombre d'apprentis" dont l'explication peut être liée "à la libéralisation de l'apprentissage et/ou aux aides exceptionnelles du Plan de relance qui allaient justement à l'encontre de l'aide unique instaurée par la réforme".
Évaluer les évolutions du droit de la formation
En dernier lieu, Vincent Cibois estime qu'il serait utile de conduire "une évaluation juridique sur la qualité du droit de la formation professionnelle. En effet, si le droit du travail fait l'objet de nombreuses études, qu'en est-il de son droit de la formation professionnelle", s'interroge-t-il. Il constate que si la loi "Avenir professionnel" "visait une 'simplification institutionnelle et réglementaire forte' comme outil d'investissement des entreprises dans les compétences de leurs salariés", cet objectif n'a aujourd'hui pas été atteint. "Force est de constater que les ajustements législatifs, réglementaires et conventionnels successifs et répétés depuis 2018 et dans son ensemble depuis 2016, 2014, 2009... ont mis à mal l'édifice normatif au point de créer des incohérences de textes, des renvois qui n'existent plus, des absences de base légale ou des doublons, pour partie seulement corrigée depuis."
Vincent Cibois interroge par ailleurs le "recours devenu systématisé à la pratique normative de l'administration, par sa diffusion régulière et répétée de textes non publiés au Journal officiel tels que les foires aux questions, Questions-Réponses ou autres Guides de lecture".
Vincent Cibois rejoint également le Synofdes sur sa proposition de création d'un "institut de recherche et d'innovation pédagogiques pour la formation continue". La formation "regroupe de nombreuses disciplines scientifiques" (politique, droit, économie, sociologie, sciences de l'éducation et de la pédagogie...). En conséquence, "au-delà de l'innovation pédagogique, cet institut pourrait poursuivre une vocation non seulement pluridisciplinaire mais également transdisciplinaire et interdisciplinaire", estime-t-il.
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Christophe Marty,
journaliste