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Après les recours en référé suspension, c’est le moment de l’examen au fond du décret n°2021-346 du 30 mars 2021 avec une séance publique programmée lundi 15 novembre 2021. Les représentants des organisations syndicales et des pouvoirs publics se feront ainsi à nouveau face au Conseil d’État pour présenter succinctement leur mémoire écrit. Après cette audience publique, la formation de jugement du Conseil doit se réunir et délibérer sur le dossier. À la veille de cette échéance, AEF info fait le point sur les multiples griefs soulevés par les organisations syndicales à l’encontre des nouvelles règles de l’assurance chômage.
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L'audience publique sur le recours au fond à l'encontre du décret du 30 mars 2021 sur l'assurance chômage se tiendra lundi 15 novembre 2021. © Conseil d''Etat
Après les procédures en référé, est venu le temps de l’examen au fond par le Conseil d’État sur les nouvelles règles de l’assurance chômage. Représentants des organisations syndicales et des pouvoirs publics se retrouveront à nouveau, lundi 15 novembre 2021, au Palais-Royal, pour la séance publique consacrée à l’examen au fond du recours à l’encontre du seul décret n°2021-346 du 30 mars 2021. Les deux procédures en référé à l’encontre de ce même décret et du décret n°2021-1251 du 29 septembre 2021 permettent de dresser un panorama relativement clair des multiples griefs sur lesquels la formation de jugement sera appelée à se prononcer dans les prochaines semaines.
Le SJR au centre des griefs
La principale opposition entre organisations syndicales et pouvoirs publics porte évidemment sur les nouvelles règles de calcul du SJR. Pour mémoire, dans sa décision du 25 novembre 2020, le Conseil d’État a annulé les articles du décret n°2019-797 du 26 juillet 2019 sur ce mode de calcul, considérant que les nouvelles règles portaient atteinte au principe d’égalité ; par effet domino, cette annulation avait aussi remis en cause les articles sur les différés d’indemnisation (lire sur AEF info). La question est de savoir si les correctifs apportés en début d’année, formalisés dans le décret du 30 mars, permettent ou pas de lever cette difficulté.
En novembre 2020, la Conseil avait expliqué que "le montant du SJR [pouvait] désormais, pour un même nombre d’heures de travail, varier du simple au quadruple en fonction de la répartition des périodes d’emploi au cours de la période de référence d’affiliation de 24 mois", ce qui constituait "une différence de traitement manifestement disproportionnée au regard du motif d’intérêt général poursuivi". À l’issue d’une série de concertations, le ministère du Travail a revu le mode calcul en introduisant un plafond afin de limiter la prise en compte des périodes d’inactivité.
Si du côté de la rue de Grenelle, on considère que le niveau de différence de traitement revu à la baisse avec ce correctif est désormais acceptable au regard de l’intérêt général, il n’en va pas de même pour les organisations syndicales qui ont multiplié les cas pratiques pour mettre en avant les différences de traitement entre allocataires aux parcours d’emploi discontinus eux-mêmes, et ceux-ci et des allocataires aux parcours d’emploi continus (lire sur AEF info).
principe assurantiel et effets indirects
Au-delà de ces différences de traitement observées, est posée la question de la conformité des nouvelles règles de calcul au regard du principe assurantiel de l’assurance chômage, tel que défini dans le code du travail. "Dans quelle mesure, la prise en compte des périodes non travaillées dans le calcul des indemnités est-elle compatible avec le principe assurantiel ?", interrogent en substance certaines organisations syndicales.
Parallèlement, des griefs sont soulevés sur les effets indirects de cette réforme du mode de calcul du SJR et de la durée du droit d’indemnisation. En premier lieu, la question se pose sur l’activité réduite, à savoir la capacité de cumuler allocations et rémunérations. Sur fond de débats sur les effets et les objectifs de cette activité réduite -le ministère voyant là une trappe à emplois précaires alors que depuis les années 1990, les partenaires sociaux l’imaginent comme un outil permettant aux demandeurs d’emploi de garder un lien avec l’activité-, les différences de traitement liées à la discontinuité des parcours d’emploi ou à la date de reprise d’activité sont au cœur des divergences de point de vue.
Alors que les organisations syndicales documentent des cas présentant une variation importante de l’indemnisation en fonction des parcours (lire sur AEF info), les pouvoirs publics considèrent que la prise en compte de la seule allocation ne saurait être retenue et qu’il faut adopter une approche plus globale en regardant l’intégralité des revenus, à savoir la somme des allocations et des rémunérations.
périodes de rémunérations inhabituelles
Outre les effets indirects de la réforme du SJR sur les différés d’indemnisation et notamment celui lié à l’Indemnité compensatrice de congés payés (ICCP) (lire sur AEF info), est aussi à l’ordre du jour, le traitement des périodes de rémunérations inhabituelles, telles que les congés maternité, les longs arrêts maladie ou les périodes d’activité partielle. Si les effets ont été corrigés depuis avec le décret n°2021-730 du 8 juin 2021 (lire sur AEF info), reste à savoir si le principe à l’œuvre consistant à reconstituer un salaire fictif est conforme à la définition légale de l’assurance chômage (lire sur AEF info).
Dans la droite ligne de la décision du 25 novembre 2020, les griefs sur la légalité de la dégressivité et sur le bonus-malus sectoriel devraient rapidement être écartés. En revanche, les différentes entrées en vigueur des dispositions sur le SJR et sur le bonus-malus sectoriel devraient à nouveau être questionnées. Les deux dispositions étant régulièrement présentées comme complémentaires -la première incitant directement les demandeurs d’emploi et la seconde les employeurs-, elles devraient être concomitantes, considèrent certaines organisations syndicales ; la réforme du SJR est en vigueur depuis le 1er octobre et celle du bonus-malus sectoriel n’aura pas d’effet opérationnel avant le 1er septembre 2022. Et les syndicats de constater que si on laisse, via la période d’observation, une année aux entreprises pour adapter leurs pratiques et réduire le cas échéant, leur taux de rupture de contrat, il n’en est pas de même pour les demandeurs d’emploi qui se voient appliquer directement la réforme.
questions de méthode
Parallèlement à ces multiples points remis en cause sur les effets de la réforme des règles d’assurance chômage, seront aussi réinterrogées les nouvelles modalités d’articulation entre partenaires sociaux et pouvoirs publics, telles que définies dans la loi "Avenir professionnel" du 5 septembre 2018. "Fallait-il que le document de cadrage de septembre 2018 soit mis à jour par l’exécutif et transmis aux partenaires sociaux ?", interrogent les organisations syndicales. Comme l’absence d’étude d’impact de la réforme, ce point devrait être écarté dans la droite ligne de la décision du 25 novembre 2020.
Le Conseil d’État va devoir aussi se prononcer sur la compatibilité entre la réforme actée et les objectifs assignés par le document de cadrage. Outre les cibles de la réforme en tant que telles, est remis en cause le niveau d’économies engendré par la réforme. Alors que le document le cadrage de septembre 2018 fixait des économies comprises entre 1 et 1,3 Md€ par an, les estimations figurant dans les documents budgétaires du PLF 2022 font état de 1,9 Md€ pour la première année complète d’application de la réforme.
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Jérôme Lepeytre,
journaliste