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L'équipe de gouvernance de l’université de Strasbourg a lancé des "Assises des ressources humaines" ce vendredi 17 septembre 2021, à l’occasion d’une assemblée inaugurale où tous les personnels étaient conviés. Organisé en ateliers d’octobre à décembre, ce temps de concertation permet d’initier une réflexion collective, qui se concrétisera à terme par l’élaboration d’un SDRH (Schéma directeur des ressources humaines). "Il ne suffit plus de définir les campagnes emplois d’une année à l’autre", souligne la VP Ressources humaines et dialogue social Élisabeth Demont, dans un entretien à AEF info le 8 septembre. L’Unistra ouvre la discussion sur certains thèmes RH – procédures de recrutement, progression de carrières, QVT, dispositifs issus de la LPR, etc., en espérant "des propositions". Plusieurs représentants du CA (issus des listes d’opposition) livrent leur avis sur ce processus.
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Elisabeth Demont, vice-présidente Ressources humaines et dialogue social de l'université de Strasbourg. AEF - P. Marion
AEF info : Vous lancez le 17 septembre des "Assises des RH", l’un des engagements de campagne de l’équipe de Michel Deneken (réélu en mars). Dans quel objectif ?
Élisabeth Demont : Nous sommes aujourd’hui dans une institution où les métiers ont grandement évolué. Nous devons réfléchir dans un contexte contraint – masse salariale, plafond d’emplois, etc. –, avec simultanément des évolutions du cadre législatif avec la Loi de transformation de la fonction publique ou encore la Loi de programmation de la recherche. Il est dorénavant indispensable de réfléchir de manière globale et pluriannuelle à la politique RH de l’établissement, en adoptant une démarche prospective.
Dans une volonté de concertation – la même que celle qui avait prévalu pour "Cap 2030"
Puis s’ouvrira un deuxième temps consacré à l’élaboration d’un Schéma directeur des ressources humaines (SDRH). Véritable feuille de route, le SDRH définira les objectifs opérationnels RH au service des missions de l’université et en référence à la stratégie de l’université. Adopter une démarche globale suppose d’envisager l’ensemble de la politique RH avec agilité, en utilisant l’ensemble des leviers à disposition. Les nouveaux, mais aussi ceux qui existent et ne sont parfois pas ou peu utilisés, sur le volet individuel comme sur le volet collectif.
La démarche prospective amène non seulement à concevoir la politique RH dans une perspective pluriannuelle, mais également à identifier les évolutions possibles ou souhaitables pour mener à bien les projets RH. Il ne suffit plus de définir les campagnes d'emplois d’une année à l’autre. L’idée, aussi, est de s’interroger sur tout support libéré, d’analyser finement les problématiques des emplois et la manière d’y pourvoir au mieux. Il est ainsi déterminant de conduire la réflexion sur plusieurs années, une perspective à cinq ans par exemple, en ayant une connaissance fine des départs à venir et simultanément une anticipation des nouvelles compétences à développer.
AEF info : Le Schéma directeur en question devrait aboutir en février 2024. N’est-ce pas un peu loin ?
Élisabeth Demont : Notre souhait est de nous donner le temps d’élaborer cette feuille de route dans le dialogue et la concertation. Nous avons fixé une date butoir pour sa validation par le Congrès. Mais si nous pouvons aller plus vite, très bien ! L’élaboration du schéma directeur impliquera des groupes de travail qui regrouperont des élus des instances, des représentants du personnel, des personnes impliquées dans la vie institutionnelle.
Des ateliers thématiques ouverts à tous les personnels se tiendront sur les différents campus de l’université.
Sont aussi prévus deux ateliers spécifiques pour les Biatss et pour les enseignants-chercheurs. Et des contributions individuelles pourront être adressées sur une plate-forme dédiée. Une synthèse des principales propositions issues des débats sera présentée en Congrès fin janvier 2022, puis transmise au comité de pilotage du SDR.
AEF info : Revenons aux Assises qui vont démarrer. Sur l’atelier consacré à "la politique d’emplois et le recrutement" par exemple, qu’attend la direction de l’université de ces échanges avec la communauté ?
Élisabeth Demont : Définir une politique globale nécessite de se placer dans une démarche pédagogique, d’expliquer le contexte, comme les contraintes de masse salariale, la non compensation du GVT, etc.. Certes, les organisations syndicales sont au fait de ces enjeux ; mais nous devons les expliquer au-delà.
L’enjeu premier des Assises est d’échanger, permettre à chacun de s’exprimer librement. En aucun cas, il ne s’agit de faire passer des décisions politiques qui seraient déjà prises. Nous espérons que des propositions pourront émerger des ateliers. Certaines pourraient être rapidement mises en œuvre – par exemple, en termes de conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée, de QVT – quand d’autres, nous le savons, nécessiteront une concertation plus large, voire une étude de faisabilité.
AEF info : Vous évoquiez de nouveaux métiers à prendre en compte… Comment avancer sur ce sujet ?
Élisabeth Demont : Il s’agit surtout de l’évolution des métiers, des fonctions et des compétences exigées… Par exemple, un gestionnaire de scolarité est le plus souvent de catégorie C. Or, au vu du niveau de technicité demandé et de la multiplicité des missions, il semblerait légitime de revaloriser ces fonctions et recruter des collègues de catégorie B. On peut d’ailleurs regretter l’absence de référentiel d’emploi type pour ces fonctions. Ce type de sujets sera assurément abordé lors des Assises, puis lors du SDRH. La question des procédures de recrutement pourra également être abordée. La mise en situation professionnelle est une procédure encore trop peu utilisée pour recruter les enseignants-chercheurs. Depuis deux ou trois ans, nous incitons très fortement à la mise en situation professionnelle, mais cela reste encore marginal. L’annonce d’une généralisation (lire sur AEF info) me semble aller dans le bon sens.
"En parallèle [du recrutement], il faut être attentif à l’évolution de carrière des personnels."
L’enjeu de toute campagne d’emploi est de permettre à l’université de remplir ses missions – en formation et recherche notamment, de garantir a minima le maintien du potentiel d’enseignement et de recherche. En parallèle, il faut être attentif à l’évolution de carrière des personnels : reconnaître leur investissement, valoriser leurs compétences, permettre les progressions de carrière, etc. Il nous faut veiller à concilier ces deux aspects [le recrutement et la progression des carrières] avec la nécessité – qui s’impose désormais à toutes les universités – de la maîtrise de l’évolution de la masse salariale. Cela nous oblige à être inventifs, à être agiles, à anticiper afin de dégager des nouveaux leviers d’action.
AEF info : Vous aviez d’abord annoncé la tenue de ces Assises avant l’été…
Élisabeth Demont : Oui, nous aurions effectivement souhaité tenir les Assises avant l’été. La situation sanitaire ne l’a malheureusement pas permis… Le calendrier de début d’année peut rendre complexe le processus que nous engageons ici.
"On peut craindre que le nombre [de repyramidages] soit insuffisant pour répondre aux besoins de l’établissement."
Dans le cadre de la préparation du SDRH [en 2022], nous aborderons les questions relatives aux dispositifs RH de la LPR. Certains font consensus et d’autres posent question. Ils provoquent dans certains cas des craintes, voire de l’opposition. Nous prendrons le temps de la réflexion et de la concertation lors de groupes de travail pour déterminer comment l’université va s’emparer de ces dispositifs, avec la volonté d’aller si possible au-delà de ce qui est donné dans le cadre de la LPR…
Par exemple, des repyramidages sont attendus. Or, on peut craindre que leur nombre soit insuffisant pour répondre aux besoins de l’établissement. À Strasbourg, 217 collègues maîtres de conférences sont éligibles. L’université peut-elle compléter le volant de promotions obtenu par un volume complémentaire ? Nous en revenons à la question de la soutenabilité. Si nous sommes toujours dans l’attente du nombre de promotions qui seront attribuées à l’université, il nous faudra néanmoins être prêts pour lancer les campagnes le moment venu, et donc avoir défini la procédure et les critères retenus.
AEF info : De quelles possibilités offertes par la LPR l’université de Strasbourg souhaite-t-elle s'emparer ?
Élisabeth Demont : Certains dispositifs proposés dans la LPR ont pris le devant. Je pense notamment aux chaires de professeur junior présentées comme une nouvelle modalité d’entrée dans le corps professoral. Or, cela va concerner une infime partie de personnes. Il s’agit plus d’un dispositif d’attractivité scientifique. Nous n’avons pas répondu au premier appel à projets car nous nous étions engagés à avoir un temps d’échanges avec les instances et la communauté.
Quelques points ont ainsi cristallisé des craintes, en faisant passer au second plan des aspects plus consensuels, même s’il peut persister encore des questionnements sur leur mise en œuvre : la revalorisation des rémunérations à l’entrée dans la carrière, le reclassement des enseignants-chercheurs, le volet indemnitaire, le repyramidage, etc.
AEF info : Comme l’a indiqué la DGS Valérie Gibert en point presse de rentrée, plus de 50 % des personnels administratifs et techniques ont déjà déposé un dossier "télétravail" pour cette rentrée, après l’expérience de la crise sanitaire. Quels sont les enjeux en termes de management ?
Élisabeth Demont : Il faut accompagner non seulement les personnels qui veulent télétravailler mais également les encadrants. Si dans un premier temps à Strasbourg, nous étions sur une expérimentation un jour par semaine [en 2019, pour une centaine d’agents], nous sommes montés à deux jours par semaine, avec une certaine flexibilité
Par ailleurs, comme le télétravail peut engendrer des difficultés à différencier les temps professionnel et privé, nous travaillons, avec le nouveau VP DDRS de l’université, sur le développement de tiers-lieux. Notre objectif est d’en développer notamment sur nos campus plus éloignés, comme à Colmar, Sélestat ou Haguenau. Enfin, ce travail à distance conduit à doter les collègues non seulement d’un équipement informatique, mais aussi de dispositifs permettant qu’ils soient aisément joints sans avoir à donner leur numéro privé.
En amont des Assises, AEF info a recueilli le point de vue de plusieurs membres récemment élus au CA de l’université de Strasbourg (lire sur AEF info) sur les enjeux au cœur de la concertation :
"Nous saluons cette initiative, qui associe les personnels. Seulement, il ne faudrait pas que les jeux soient faits d’avance, comme tel grand débat ou telle consultation citoyenne. Il y a des espoirs qu’il ne faudra pas décevoir… Bon nombre d’agents Biatss de catégorie C n’ont pas de perspectives de promotion, il n’y a pas assez de postes ouverts aux concours. Beaucoup de maîtres de conférences attendent de passer professeurs, des aspirations légitimes. La situation des contractuels – dont la proportion est très importante chez les administratifs, ouvriers, techniciens et ingénieurs – est préoccupante.
Autre problème, le tassement du recrutement. Le sous-encadrement de certaines filières est connu. Mais, quand les jeunes docteurs postulent, il n’y a pas assez de postes de MCF pour eux. Aujourd’hui, les conditions d’enseignement que l’on connaît depuis plusieurs années en médecine – avec une retransmission vidéo dans d’autres amphis – se retrouvent dans d’autres composantes. Nous avons besoin de davantage de salles de cours et de davantage d’enseignants titulaires.
Concernant la LPR, les chaires de professeur junior représentent une attaque contre le statut des enseignants-chercheurs. Elles sont source d’inégalités, de concurrence entre les personnels. Et, avec les mesures sur les rémunérations, cela revient à gouverner par les primes. Le cadre financier reste contraint. On peut craindre que ces Assises soient une mise en pratique du protocole rémunérations et carrières."
"Nous sommes plutôt favorables à la démarche : le dialogue, sous toutes ses formes, est dans l’ADN de notre organisation. Nous serons partie prenante. Ce qui ne signifie pas accorder un blanc-seing… Nous craignons un peu le discours sur le mode : 'nous faisons avec les moyens accordés par le ministère'.
Sur le plan RH, nous visons une stabilisation de l’emploi au sens large. Nous serons vigilants quant aux conditions de rémunération, notamment celles des contractuels. À la suite de la loi Sauvadet, l’université avait pu procéder à des titularisations. Mais depuis, le vivier s’est reconstitué et nous avons senti une volonté, au niveau établissement, d’éviter la CDIsation. Certains chefs de service sont dans l’incompréhension. Et, cela peut entraîner des départs : au patrimoine, au numérique, etc.
Sinon, la promotion des personnels enseignants sera un sujet important : l’université devrait développer un système transparent, avec des critères affichés, admis par tous. Nous serons aussi attentifs à l’égalité hommes-femmes [pour lequel un groupe de travail est déjà en place], aux violences sexistes, sexuelles et homophobes au travail. Les sujets d’argumentation ne manquent pas.
Nous regarderons aussi les dispositifs de la LPR. CDI de mission, chaires juniors, etc. : il semble que personne n’en veuille vraiment pour le moment. Cela ne répond pas aux besoins d’une université comme la nôtre. Mais peut-être certains responsables de programmes de recherche seront intéressés."
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Pascaline Marion,
journaliste