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"Sommes-nous, avec les ZFE, en train de rendre les villes inaccessibles ?" Ainsi s’interroge Camille Combe, chargé de mission à La Fabrique de la cité, dans une note mise en ligne mercredi 12 mai 2021. "Si la restriction de la circulation des véhicules les plus polluants paraît être une mesure efficace pour réduire les concentrations de polluants émis par les déplacements de véhicules motorisés, elle crée de nouvelles contraintes pour la mobilité des urbains", résume-t-il, estimant que cela peut être "vécu comme une mesure renforçant les inégalités sociales, économiques et territoriales".
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A Lyon, les mesures de soutien au changement de véhicules "n'ont pas eu le succès escompté", note La Fabrique de la cité. Droits réservés - DR - Thierry Fournier - Métropole de Lyon
Après avoir analysé l’an dernier les modes de financement de la mobilité décarbonée (lire sur AEF info), Camille Combe, chargé de mission à La Fabrique de la cité, se penche sur les zones à faibles émissions. Dans une note mise en ligne mercredi 12 mai, il s’interroge : "Sommes-nous, avec les ZFE, en train de rendre les villes inaccessibles ?". Car "si la restriction de la circulation des véhicules les plus polluants paraît être une mesure efficace pour réduire les concentrations de polluants émis par les déplacements de véhicules motorisés, elle crée de nouvelles contraintes pour la mobilité des urbains", affirme-t-il.
Contraintes qui "peuvent se révéler lourdes de conséquences pour les habitants et entreprises n’ayant d’autre choix que de se déplacer en véhicule motorisé et ne pouvant acquérir un véhicule moins polluant". De ce point de vue, poursuit-il, la mise en place d’une ZFE peut être "vécue comme une mesure renforçant les inégalités sociales, économiques et territoriales".
Des effets "importants" sur la logistique
En ce qui concerne le secteur de la logistique urbaine, cette mesure serait "nécessaire mais pas indolore", estime ainsi l’auteur : le parc de véhicules étant plus vieux que les véhicules des particuliers (et donc a priori plus polluants), il serait particulièrement ciblé par les nouvelles restrictions de circulation. Or, souligne l’étude, "le marché de la logistique urbaine se caractérise par son atomisation et le nombre élevé d’entreprises de tailles diverses", les petites "paraissant plus vulnérables face à de tels changements".
Conséquence, "la mise en place d’une ZFE peut avoir des effets microéconomiques et macroéconomiques importants sur le marché de la logistique", souligne l’étude, s’appuyant sur le cas de Londres, où a notamment été observée une réaffectation des véhicules les plus polluants en dehors de la zone. L’auteur rappelle donc que pour "ne pas faire de la ZFE un instrument portant atteinte au tissu économique le plus vulnérable, l’enjeu de la transition et de l’accompagnement est essentiel".
"Injonction au changement"
Quant aux conséquences pour les ménages, si les études manquent, Camille Combe "formule des hypothèses" en observant comment s’adapte le monde de la logistique. Là encore, la ZFE introduit une "contrainte nouvelle sur les déplacements des personnes, lesquelles peuvent mettre en place différentes stratégies d’adaptation" : changement de véhicule, report vers d’autres modes de transport, paiement d’une amende ou contournement de la zone…
Si c’est a priori la première qui sera privilégiée, "cette injonction au changement impose un surcoût aux ménages devant renouveler un voire plusieurs véhicules pour pouvoir continuer à se déplacer", ce qui pèse davantage sur les finances des habitants des communes périphériques, rappelle l’auteur. Un phénomène d’autant plus marqué dans le cas où les villes font le choix d’instaurer un péage urbain. Et l’auteur d’évoquer "de lourdes conséquences pour certains publics".
Protection de la vie privée
Or, poursuit-il, "les différentes expériences européennes montrent dans leur ensemble que les ZFE n’ont pas permis de réduire le trafic automobile et que les effets sur la qualité de l’air urbain sont contrastés", notamment en raison de la nécessité de pouvoir contrôler le respect des règles de restriction imposées, ce qui suppose des moyens financiers mais aussi des dispositifs de contrôle (manuel ou automatique). Plus efficace, le recours dispositif automatique "soulève des questions liées à la protection de la vie privée, les données issues de la vidéosurveillance étant des données personnelles", explique Camille Combe.
Des dispositions réglementaires et législatives encadrent en France cet usage, et la Cnil a rappelé à l’été 2020, "qu’en l’état actuel de la réglementation, le recours à des dispositifs de lecture automatique de plaques d’immatriculation n’est pas possible pour la recherche d’infractions". "Les dispositions actuelles en France limitent pour l’heure l’efficacité des dispositifs de contrôle et, in fine, celle des ZFE", résume le chargé de mission, pour qui cet outil reste "un moyen parmi d’autres" permettant d’améliorer la qualité de l’air en ville.
Il recommande notamment de "considérer d’autres leviers d’actions, en dehors du champ des transports et en direction d’autres secteurs responsables d’émissions de polluants atmosphériques, au premier rang desquels l’agriculture et le bâtiment". "Toute l’ambition des villes en matière d’amélioration de la qualité de l’air ne peut pas reposer sur les seules ZFE, surtout quand leur mise en œuvre se fait au prix d’une perte d’accessibilité et de lourdes conséquences socio-économiques", insiste-t-il, évoquant un enjeu "systémique".
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Emilie Buono,
journaliste