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Le niveau des étudiants, mesuré en part de bacheliers avec mentions B ou TB, varie d’une LAS à l’autre (lire sur AEF info). Diffère-t-il des L1 classiques correspondantes ? Selon notre analyse, l’option santé fait grimper le taux en Staps (+29 points), où l’afflux de candidats crée un système sélectif de fait. Mais elle le fait baisser en droit (-8). Contactés par AEF info, les doyens de ces deux disciplines livrent leur sentiment sur ces écarts et s’interrogent sur le classement commun des dossiers, traités par le même algorithme, que les candidats aient opté pour une L1 classique ou une LAS.
Cette dépêche est en accès libre.
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Nous utilisons les données Parcoursup 2020 publiées en open data sur le site du MESRI. Ce jeu de données présente les vœux de poursuite d’études et de réorientation dans l’enseignement supérieur ainsi que les propositions des établissements pour chaque formation – hors apprentissage – à la fin du processus d’affectation de la plateforme Parcoursup pour la session 2020 (du 22 janvier au 24 septembre 2020).
L’étude vise les universités publiques, bien que des Pass et LAS existent aussi dans d’autres établissements (Catho de Lille, Catho de Lyon, Inalco et UCO Angers). Nous laissons aussi de côté l’université Grenoble Alpes : il n’a pas été possible d’isoler les capacités d’accueil relevant des LAS car la jauge de ces dernières est fondue dans celle des licences classiques.
Nous nous concentrons sur les néobacheliers 2020 (appelés par la suite bacheliers) admis dans les nouvelles licences avec une option accès santé LAS, créés lors de la réforme de l’accès aux études de santé. En regard, nous étudions les données relatives aux admis dans les licences classiques, dans les filières et les universités où existe leur équivalent "avec option accès santé". Par exemple, nous examinons la filière chimie ou droit à Bordeaux, car leur pendant LAS est bien proposé : en revanche, nous écartons la filière AES ou physique dans cette université, car leur pendant LAS n’y existe pas.
Le niveau académique du vivier de bacheliers recrutés dans les LAS diffère-t-il de celui de la population arrivant dans les L1 classiques via Parcoursup ? Pour leur première année d’existence, les LAS ont recruté 42,6 % de néobacheliers avec mention B ou TB, lors de la procédure Parcoursup 2020. C’est moins que dans les Pass (66,3 %), l’autre voie d’accès aux études de médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie (MMOP) depuis la fin de la Paces lors de la réforme des études de santé, comme nous l’avons montré dans une précédente dépêche (lire sur AEF info).
Si la part de "bons élèves" varie en LAS selon les disciplines proposées, s’échelonnant de 7 % en électronique à 85 % en sciences biomédicales, il s’avère que cette part est souvent plus élevée dans les LAS que dans les licences classiques de la même discipline.
Jusqu’à 57 points d’écart, en "santé et société"
En "santé et société", l’écart atteint 57 points : la part de mentions B ou TB est de 66,7 % en LAS, contre 9,5 % en licence classique. Mais les effectifs y sont très limités, contrairement à la psychologie et Staps où l’écart avoisine les 30 points, sur des volumes bien plus importants. Ainsi en psychologie, on observe un taux de mentions B et TB de 67,3 % en LAS contre 35,5 % en licence classique. En Staps, il est de 48,9 % en LAS contre 20,2 % en licence classique.
"Staps est déjà une licence en tension", rappelle Aurélien Pichon, président de la C3D (lire sur AEF info). "Le taux de pression y est de 10 dossiers pour une place environ. Dans mon université, à Poitiers, nous étions à un ratio de 40 dossiers pour une place en LAS Staps. Dans cette configuration, bien sûr, les meilleurs dossiers sont pris." Une sélection qui aboutit, dans le cas de Poitiers qui ne propose pas de Pass, à un taux de 100 % de mention B ou TB parmi les néobacheliers admis en LAS Staps, contre 25 % en licence Staps classique, à la rentrée 2020.
Moins de mentions en LAS En droit et en économie-gestion
En revanche, deux autres "grosses" disciplines de licence proposant des LAS semblent aller à contre-courant. En économie-gestion et en droit, le taux de bacheliers mention B ou TB est plus élevé en licence classique que dans les nouvelles LAS. L’écart, qui est inférieur à 10 points, reste significatif. Ainsi en économie-gestion, 18,5 % des bacheliers admis en LAS disposaient d’une mention B ou TB, contre 23,2 % en licence classique. En droit, ces taux s’établissaient respectivement à 25,7 % en LAS et 33,9 % en licence classique.
"On a peu de recul pour le moment", tempère Jean-Christophe Saint-Pau, président de la Conférence des doyens de droit et de science politique. Parmi les explications possibles, il avance le fait que "les facultés de droit présentent une originalité : elles ont le quasi-monopole pour faire accéder aux formations réglementées (huissiers, avocats, etc.), donc les bons étudiants qui viennent avec ce type de projet optent forcément pour le droit. Parcoursup a renforcé cela : on a déjà observé une hausse des mentions B et TB", depuis sa mise en application en 2018.
En outre, "les licences doubles (droit-langues, droit-philosophie, droit-histoire…) qui sont sélectives se sont multipliées, et la part des mentions B et TB peut y être très élevée", note-t-il (lire sur AEF info). Les LAS "viennent se greffer à ce phénomène" qui touche les licences classiques de droit. Elles offrent aux candidats ne s’étant pas démarqués par un parcours scolaire brillant dans le secondaire une nouvelle "option pour bonifier un dossier" en licence, "avant de tenter un master sélectif par la suite". Elles leur permettent de "se singulariser, comme les double licences sélectives", alors qu’elles ne sont pas sélectives, justement.
Dans la visualisation ci-dessous, chaque ligne correspond à une discipline (données agrégées au niveau national). Pour chaque discipline, nous représentons le taux de mention B et TB parmi les admis bacheliers en L1 classique (en rouge) et en LAS (en bleu). Plus les deux points sont éloignés, plus l’écart est important entre les deux taux constatés. La taille des points varie selon le volume des effectifs.
La question du classement indifférencié des dossiers
Les deux doyens que nous avons interrogés pour apporter un éclairage à ces données ont soulevé le même point : la question du classement indifférencié des dossiers entre les licences classiques et les LAS d’une même discipline. En Staps, la plateforme Parcoursup prévoit d'"appliquer le même algorithme à l’ensemble des profils", qu’ils aient demandé une licence classique ou une LAS, résume Aurélien Pichon. Si l'établissement veut établir un distinguo, il doit le faire... à la main, en reprenant chaque dossier. "On ne peut pas tous les lire pour détecter l’aspect plus médical de la démarche individuelle… C’est un problème, car en LAS, le projet du futur étudiant est différent de celui qui demande une L1 classique en Staps."
Le traitement différencié n'est pas impossible, mais gourmand en temps, en moyens techniques et en ressources humaines... "À Poitiers, on a pu faire le distinguo entre les deux demandes et traiter différemment les candidatures. On a appliqué l’algorithme Staps, mais en modifiant certains coefficients, de façon adaptée. Celui du sport et de l’engagement associatif a été diminué mais celui des matières scientifiques a été augmenté, par exemple. Ce qui a, du coup, augmenté la présence relative des bons profils avec bac S, par rapport à la L1 classique", explique-t-il.
En droit aussi, "l’algorithme est utile, il classe selon les attendus de droit, et sur cette base, la commission d’orientation regarde les dossiers", explique Jean-Christophe Saint-Pau. "Cela pose une difficulté dans la gestion des classements, il faut réexaminer les dossiers pour bien orienter. Que ce soit en droit, en double licence ou en LAS, mais aussi dans les différents sites de l’université de Bordeaux, comme Agen ou Périgueux. Pour les LAS, cela représentait 75 personnes en 2020. J’ai un délégué LAS dans la commission : il prend les dossiers classés, un par un, pour les examiner."
Et en 2021 ? "Il faut voir si le nombre de dossiers en droit augmente. On sera peut-être amené à modifier notre façon de penser et de procéder", répond Jean-Christophe Saint-Pau pour les filières du droit. En Staps, en revanche, la question est tranchée. La filière a obtenu l’autorisation de la Dgesip et du cabinet du MESRI de traiter distinctement les candidatures Parcoursup en licence Staps et celles des licences Staps avec accès santé, en décembre 2020 (lire sur AEF info). "C’est plus de travail, souligne Aurélien Pichon, mais le résultat sera plus satisfaisant pour tout le monde."
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Marie Simon,
journaliste