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Lancée en septembre dernier entre le gouvernement et les organisations syndicales et patronales, la concertation sur l’assurance chômage va se conclure par une réunion multilatérale, mardi 2 mars 2021, durant laquelle Élisabeth Borne présentera les grands axes de la réforme qui devront être formalisés dans un décret. Après la mise à l’arrêt des règles issues du décret de juillet 2019 par la crise sanitaire et par la décision du Conseil d’État de fin novembre, les discussions tripartites ont porté sur les modalités de calcul du SJR (salaire journalier de référence), du bonus-malus sectoriel, de conditions d’éligibilité ou encore de la dégressivité. AEF info fait le point sur les enjeux de cette ultime réunion.
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Ministère du Travail, rue de Grenelle. jl
Les représentants des organisations syndicales et patronales doivent participer dans la matinée du mardi 2 mars 2021, à une visioconférence durant laquelle Élisabeth Borne doit enfin leur présenter les axes de la réforme de l'assurance chômage. "Cela fait suite à beaucoup de discussions depuis le mois de septembre (lire sur AEF info)", rapporte la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, sur BFM, dimanche 28 février.
CRISE SANITAIRE ET CONSEIL D'ÉTAT
Décidée par Muriel Pénicaud et son cabinet, puis mise à l’arrêt durant la crise sanitaire, cette réforme de l’assurance chômage a été un des premiers dossiers sur le bureau de la ministre arrivée cet été, rue de Grenelle. Initialement repoussée au 1er janvier 2021, l'application de nouvelles règles a été officiellement reportée au 1er avril lors de la deuxième conférence de dialogue social présidée par Jean Castex (lire sur AEF info). Parallèlement, le Conseil d’État a censuré les dispositions du décret originel de juillet 2019 sur le calcul du SJR ainsi que sur le bonus-malus sectoriel envisagé pour limiter le recours aux contrats courts dans certaines branches professionnelles (lire sur AEF info).
Cette ultime réunion doit donc être l’occasion pour la ministre de présenter les contours du prochain décret en Conseil d’État qui entrera en vigueur en plusieurs phases : probablement, à l’été, pour les modalités de calcul du SJR servant de base au calcul des indemnités des demandeurs d’emploi et pour le bonus-malus sectoriel, puis lorsque le marché du travail sera redevenu suffisamment dynamique pour les conditions d’éligibilité et pour la dégressivité. D’ici là, il est probable qu’un décret soit rapidement pris pour prolonger au-delà du 31 mars, les mesures actuellement en vigueur (lire sur AEF info).
front uni des SYNDICAts SUR LE SJR…
Les modalités de calcul du SJR constituent un des principaux objets de discorde entre le ministère et les organisations syndicales qui, une fois n’est pas coutume, se sont alliées pour communiquer à l’unisson leurs ressentis vis-à-vis de la réforme (lire sur AEF info). Il est à noter que l’opposition syndicale est quand même moindre que ce qu’elle était en 2019, quand Muriel Pénicaud justifiait la nécessité de la réforme en expliquant qu’il n’était pas possible de gagner plus au chômage qu’en emploi, en se fondant sur des moyennes. Très rapidement après son arrivée au ministère, Élisabeth Borne a mis de côté cet argument, reconnaissant que "les nouveaux modes de calcul tels que proposés en 2019, pouvaient conduire à des allocations très basses", comme elle l’a rappelé le 28 février sur BFM.
La ministre reprend alors l’argument avancé par le Conseil d’État pour justifier sa censure des articles sur le SJR du décret de 2019, à savoir celui de la différence de traitement. Ce qui pose problème désormais, c’est l’iniquité entre les demandeurs d’emploi qui ont connu des parcours heurtés avec une succession de contrats courts et ceux qui ont été en temps partiel. "Aujourd’hui, quand vous travaillez tous les jours à mi-temps ou un jour sur deux à temps plein, vous travaillez le même nombre d’heures et vous avez une allocation qui varie du simple au double", répète à l’envi, Élisabeth Borne. Pour réduire cette iniquité, l’option choisie n’est pas de revoir à la hausse les conditions d’indemnisation des anciens temps partiels, mais plutôt de réduire celles des parcours heurtés.
En pratique, d’après les éléments présentés aux partenaires sociaux lors des réunions bilatérales préparatoires, on s’oriente vers une réduction des effets du mode de calcul issu du décret de 2019, en instaurant un plancher en deçà duquel le SJR ne pourrait descendre par rapport aux règles de 2017. L’hypothèse sur la table laisse envisager une baisse maximale de 43 % du SJR de la convention 2017 (lire sur AEF info). "Dans la conjoncture actuelle, avoir des allocations élevées peu de temps est-ce mieux qu’avoir une allocation un peu plus basse pendant plus longtemps ? Je ne pense pas", explique la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion. Quoi qu’il en soit, les désaccords perdureront entre l’exécutif et les organisations syndicales qui ne manqueront de mettre en avant l’apparent paradoxe consistant d’un côté à mettre en place et à prolonger une aide exceptionnelle pour les permittents (lire sur AEF info) et de l’autre, à entériner une réforme du SJR qui percutera fortement ces mêmes permittents.
… ET du PATRONAT SUR LE BONUS-MALUS
La question du bonus-malus sectoriel sera sans aucun doute, elle aussi, conflictuelle entre le ministère et les partenaires sociaux. Outre l’insatisfaction des syndicats regrettant le caractère sectoriel de la mesure, l’opposition des organisations patronales demeure intacte ; pour mémoire, certaines fédérations patronales avaient aussi porté des recours devant le Conseil d’État sur ce thème. "Nous continuons à penser que ce système qui, intellectuellement sur PowerPoint peut avoir du sens, est absurde dans sa déclinaison opérationnelle", expliquait récemment Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef (lire sur AEF info).
"Cette réforme est nécessaire notamment pour lutter contre la précarité et dissuader les entreprises de recourir de façon excessive à des contrats courts", répond Élisabeth Borne sur BFM. Le ministère devrait s’appuyer sur les travaux de la mission Igas-IGF qui planche sur le sujet depuis l’automne dernier (lire sur AEF info). La première mission confiée aux deux inspections est de revoir la maille des secteurs concernés et de prévoir une disposition autrement plus fine que celle initialement imaginée dans le décret de 2019 qui s’appuyait sur la nomenclature NAF 38 qui, rappelons-le, divise l’économie en 38 grands secteurs d’activité. L’objectif est d’aboutir à un dispositif qui permettrait de comparer des entreprises comparables entre elles et non plus de mettre sur les plateaux d’une même balance, une entreprise de remontée mécanique et la SNCF, par exemple.
des calendriers décalés entre le SJR et le bonus-malus
Outre la pertinence des bornes des taux fixées en 2019, la mission est censée aussi trouver des solutions pour les entreprises fortement touchées par la crise sanitaire actuelle. Du point de vue de la rue de Grenelle, ce bonus-malus sectoriel et le SJR se répondent, le premier visant les entreprises et le second les demandeurs d’emploi. En conséquence, il est envisagé de les faire entrer en vigueur concomitamment.
Ceci à une nuance près : si la réforme du SJR s'appliquera probablement à l’été, celle du bonus-malus se fera en deux temps. D’abord, il faut examiner le comportement des entreprises pendant un an, puis mettre en œuvre effectivement la modulation des cotisations patronales. En pratique, la modulation effective n’interviendra au plus tôt qu’à l’été 2022, soit quelques mois avant l’extinction du décret de carence pris après l’échec de la dernière négociation paritaire de la convention d’assurance chômage.
ÉLIGIBILITÉ ET DÉGRESSIVITÉ
"Quand le marché du travail est plus dynamique, on peut considérer que c’est logique que les règles ne soient pas les mêmes que quand le marché est dégradé", considère Élisabeth Borne, justifiant là sa volonté de conditionner l’entrée en vigueur des conditions d’éligibilité et de dégressivité à un retour à un marché du travail plus dynamique qu’actuellement. Pour mémoire, la durée d’affiliation minimale est passée de 6 à 4 mois sur les 24 derniers mois depuis le 1er août 2020 ; les conditions de rechargement demeurent alignées sur celles d’entrée dans l’indemnisation.
De même, a été neutralisée, la dégressivité, à savoir la baisse du niveau de l’allocation, à partir du 7e mois d’indemnisation, pour les allocataires de moins de 57 ans ayant perdu une rémunération supérieure à 4 500 euros bruts mensuels ; en pratique, le décompte des 182 jours au-delà desquels se déclenche la dégressivité est arrêté depuis le 1er mars 2020.
INDICATEURS D’AMÉLIORATION DU MARCHÉ DU TRAVAIL
Sur ces deux mesures, il ne semble plus d’actualité d’envisager des adaptations spécifiques, comme des conditions d’éligibilité plus favorables pour les jeunes ou un allongement du délai de déclenchement de la dégressivité. La question est plutôt de trouver les bons indicateurs qui permettront de dire si, oui ou non, la situation du marché du travail s’est améliorée, et qui déclencherait la mise en œuvre des mesures initialement envisagées.
La combinaison de deux indicateurs est envisagée pour apprécier l’amélioration du marché du travail : un indicateur de flux et un autre de stock qui seraient lissés sur quelques mois. Parmi les indicateurs de stock, figurent le taux de chômage au sens du BIT, les DEFM ou encore l’emploi salarié. Pour ce qui est des indicateurs de flux, on a les DPAE ou encore le taux de retour à l’emploi des chômeurs. Serait actuellement privilégiée, une combinaison entre les DEFM en catégorie A — c’est-à-dire n’ayant pas du tout travaillé — et les DPAE en contrat de plus d’un mois, lissée sur quatre mois. Ce point demeure encore à discuter entre partenaires sociaux et ministère, mardi 2 mars.
un déclenchement unique ou une adaptation automatique ?
Enfin, reste à savoir si ces critères de retour à bonne fortune fonctionneront dans les deux sens, ou s’ils seront prévus pour ne fonctionner qu’une fois pour déclencher la réforme initialement prévue quand la situation socio-économique le permettra. D’un côté, les organisations syndicales pourraient s’inquiéter de voir mis en place un système à sens unique craignant qu’après une amélioration, la situation se dégrade à nouveau et que les règles plus dures alors en vigueur ne soient plus adaptées.
De l’autre, un système de modulations des paramètres en fonction de la conjoncture comme aux États-Unis, en Suisse, en Pologne ou au Canada, pourrait remettre en cause la nature même des négociations d’assurance chômage et le rôle des partenaires sociaux. Lors de la négociation de 2014, la délégation patronale avait présenté un tel dispositif qui avait fait l’objet d’une opposition unanime des organisations syndicales…
DOSSIERS À VENIR
Après cette réunion tripartite, outre les consultations sur les textes réglementaires, le sujet de l’assurance chômage sera loin d’être épuisé, puisqu’à compter d’avril, en théorie, une nouvelle concertation est censée s’ouvrir sur la gouvernance de l’assurance chômage. De plus, les discussions annoncées sur le financement post-Covid de la protection sociale devraient aussi intégrer l’assurance chômage. La semaine dernière, l’Unédic a estimé à près de 40 Md€, l’impact financier de la crise sanitaire sur 2020, 2021 et 2022, le dette du régime étant attendue pour dépasser les 70 milliards à la fin de l'année prochaine (lire sur AEF info).
L’employeur qui n’aménage pas en télétravail, conformément aux préconisations du médecin du travail, le poste occupé par un salarié déclaré inapte, n’exécute pas loyalement son obligation de reclassement dès lors que cet aménagement est compatible avec les missions réalisées par l’intéressé. Peu importe que le télétravail n’ait pas été mis en place dans l’entreprise, cette organisation du travail pouvant résulter d’un avenant au contrat de travail (aujourd’hui, d’un accord par tout moyen). C’est ce que retient la Cour de cassation dans un arrêt publié du 29 mars 2023.
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Jérôme Lepeytre,
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