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Les syndicats "pourront continuer à avoir un rôle de médiateur entre l’employeur et l’agent concerné" via des réunions préalables aux sessions de promotion, estime Mathilde Icard, présidente de l’ADRHGCT (association nationale des DRH de grandes collectivités), interrogée par AEF info le 22 janvier 2021 sur la réforme des CAP prévue par la loi Dussopt
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Pour Mathilde Icard, présidente de l'association des DRH de grandes collectivités, il faut être vigilant sur l'accroissement des inégalités entre femmes et hommes lié au télétravail D.R.
AEF info : À la demande de la coordination des employeurs territoriaux et de votre association, le gouvernement a accepté de revoir en partie le calendrier d’élaboration des lignes directrices de gestion (lire sur AEF info). Comment cette réforme a-t-elle été mise en place par les collectivités ?
Mathilde Icard : Dans l’ensemble, les grandes collectivités ont d’abord choisi de se concentrer sur les critères d’évolution professionnelle pour ne pas pénaliser le déroulé de carrière des agents, avant d’élaborer leur stratégie pluriannuelle de ressources humaines. Quasiment toutes ont donc adopté à ce jour leurs LDG promotion interne et avancement pour les six prochaines années. Même si les CAP (commissions administratives paritaires) ne sont plus compétentes sur le sujet depuis le 1er janvier 2021, la plupart des collectivités disposent d’une marge car il y a rarement des sessions en début d’année. Ces dernières dépendent des entretiens d’évaluation qui ont souvent lieu en décembre ou janvier. Au CDG 59 (centre de gestion du Nord), notre prochain cycle de promotion ne sera pas organisé avant le mois d’avril.
"Il s’agit d’une démarche itérative qui va être enrichie progressivement par les collectivités."
S’agissant du volet RH des LDG (lignes directrices de gestion), bon nombre de collectivités sont en train de mener ce travail de réflexion. Les documents existent souvent, mais il faut désormais les articuler entre eux. Vu l’ampleur de la tâche, il était difficile de mener ce travail en quatre mois, dans un contexte de crise sanitaire qui mobilise au quotidien les DRH, et alors que dans les communes, les nouveaux élus sont arrivés il y a à peine six mois.
C’est pour cela que nous avions demandé dès le mois d’avril dernier un report de la date du 31 décembre 2020, afin de pouvoir travailler correctement avec les élus locaux, les syndicats et les encadrants (lire sur AEF info). Demande que nous avons réitérée auprès de la ministre Amélie de Montchalin en octobre.
Dans tous les cas, il s’agit d’une démarche itérative qui va être enrichie progressivement par les collectivités.
AEF info : L’association des DRH territoriaux a depuis le début soutenu le principe des LDG, malgré les nombreuses critiques des syndicats qui regrettaient la suppression des principales compétences des CAP. Pour quelles raisons ?
Mathilde Icard : Les LDG sont un bon outil qui garantit une transparence sur les procédures de promotion et d’avancement, avec un dialogue en amont grâce au passage devant le comité technique. Chaque agent sait désormais s’il ou elle remplit les critères pour obtenir une promotion par exemple. C’est un moyen de lutter contre les discriminations, qu’elles soient liées au genre, à l’état de santé ou encore à l’activité syndicale.
À travers la stratégie pluriannuelle des ressources humaines, les LDG nous permettent de réfléchir aux métiers d’avenir et à leur articulation avec le plan de formation, ou encore aux questions d’égalité professionnelle. Je relève que l’avis des comités techniques locaux s’est révélé en général positif, car les LDG ont été construites dans une logique de dialogue social. Même si au niveau national, la position des syndicats peut être différente.
"Rendre transparents les processus permet de montrer que les décisions ne dépendent pas de la tête du client."
Il s’agit maintenant de voir comment continuer à associer les syndicats à l’examen des dossiers individuels, sans contourner l’intention du législateur et recréer des CAP bis. Plusieurs collectivités et centres de gestion ont prévu de mettre en place des réunions avant les cycles de promotion. C’est aussi le cas du CDG 59 (centre de gestion du Nord), où l’accord de chaque agent concerné sera requis.
Les organisations syndicales pourront continuer à avoir un rôle de médiateur entre l’employeur qui prend la décision et l’agent concerné, en complément du travail mené par l’encadrant. Rendre transparents les processus permet de montrer que les décisions ne dépendent pas de la tête du client. C’est particulièrement utile pour la promotion interne, qui fait beaucoup plus de déçus que d’heureux en raison du faible nombre de places disponibles.
AEF info : Au centre de gestion du Nord, que vous dirigez, les LDG promotion interne ont été adoptées mi-décembre. Quels sont les critères d’examen des dossiers que vous avez privilégiés ?
Mathilde Icard : Les élus locaux et les syndicats sont tombés d’accord pour augmenter la pondération de la formation continue. Nous avons aussi souhaité valoriser le management en mode projet, qui se développe de plus en plus – et pas seulement le mode de gestion hiérarchique.
En revanche, nous n’avons pas revalorisé la valeur professionnelle, comme l’ont fait d’autres collectivités, car les syndicats ne le souhaitaient pas, ce qui s’est traduit par une abstention lors du vote des LDG-PI. Au CDG 59 toutefois, l’ancienneté n’était pas prédominante jusqu’à présent pour les évolutions de carrière.
AEF info : La loi Dussopt oblige les collectivités à revoir leurs accords dérogatoires aux 35 heures avant juin 2021
Mathilde Icard : Celles qui sont concernées sont toutes en phase de diagnostic ou l’ont déjà fait, et réfléchissent aux sujétions à maintenir ou pas, et à l’articulation des cycles de travail. C’est complexe car beaucoup d’agents travaillent sur un cycle annuel. Difficile donc de récupérer X postes en augmentant le temps de travail des agents, comme l’affirment souvent les chambres régionales des comptes.
"Revenir aux 1 607 heures peut être l’occasion de consacrer enfin du temps à la prévention des risques professionnels "
À l’inverse, revenir aux 1 607 heures peut être l’occasion de consacrer enfin du temps à la prévention des risques professionnels et à la formation des agents les plus exposés, souvent des personnels de catégorie C. Il peut être plus utile de sanctuariser quatre jours pour des échanges entre pairs ou des analyses de pratiques qu’ajouter quatre minutes de plus par jour à chaque agent. Ces temps collectifs vont permettre d’améliorer le bien-être des agents et aussi le service rendu aux usagers. N’oublions pas que certaines collectivités n’étaient pas demandeuses de cette réforme
AEF info : La généralisation du télétravail pendant le premier confinement a obligé les collectivités à réfléchir à ce mode d’organisation du travail qu’elles pratiquaient peu jusqu’alors…
Mathilde Icard : Il est certain que la crise sanitaire a bouleversé notre vision du télétravail, ce qui introduit un biais. Les accords sur le temps de travail signés dans les prochains mois devront sans doute être revus. Dans les stratégies RH, les nouveaux modes d’organisation du travail étaient souvent vus comme une contrepartie à l’augmentation du temps de travail. Aujourd’hui, le télétravail est entré dans les habitudes donc ce n’est plus une contrepartie pour les agents. Il peut même être connoté négativement, en raison de l’isolement qu’il entraîne parfois et de la porosité croissante entre vie personnelle et vie professionnelle. Le télétravail peut aussi s’accompagner d’un accroissement des inégalités entre hommes et femmes. Il revient aux DRH de faire respecter le droit à la déconnexion des agents.
Nous sommes d’ailleurs très favorables à la reconnaissance juridique des accords locaux que propose la mission Esch-Vigouroux-Rouquette sur la négociation collective (lire sur AEF info). À l’avenir, il va falloir assouplir nos méthodes de négociation, définir des accords de méthode et des agendas sociaux. Les syndicats doivent être davantage considérés comme des partenaires.
AEF info : Autre dispositif prévu par la loi Dussopt, souvent jugé moins prioritaire que les LDG, l’élaboration d’un plan d’action en faveur de l’égalité professionnelle femmes-hommes dès 20 000 habitants avant le 31 décembre 2020
Mathilde Icard : Les grandes collectivités ont entamé une réflexion sur le sujet depuis plusieurs années, donc la loi consistait surtout pour elles à mettre à jour les plans existants. De même, les dispositifs de recueil des signalements de violences sexistes et sexuelles existent le plus souvent, il reste à les structurer.
"La mixité des métiers passe par des mesures d’accompagnement et un système d’entraide pour les agentes et agents qui sont en minorité dans un service"
Mais l’égalité n’est pas un sujet simple qu’on pourrait cantonner à de bonnes intentions. Pour réduire les inégalités salariales, il faut agir à tous les niveaux. Dès le recrutement, les offres d’emploi devraient par exemple être rédigées en utilisant l’écriture inclusive afin de favoriser la mixité des métiers. Sur le site Place de l’emploi public, la plupart des offres ne sont pas féminisées, tandis que d’autres n’existent pas au masculin.
La mixité des métiers passe aussi par des mesures d’accompagnement et un système d’entraide pour les agentes et agents qui sont en minorité dans un service. Par exemple, un homme dans une crèche ou une femme dans la propreté. Prévoir des équipements et des vestiaires pour les deux sexes devrait aussi être systématique.
Voici une sélection des brèves fonction publique de la semaine du 29 mai 2023 :
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Florianne Finet,
journaliste