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La commission spéciale de l’Assemblée nationale chargée d’examiner le projet de loi d’accélération et simplification de l’action publique a adopté le texte le 17 septembre 2020 à l’issue de 23 heures de débat. De nombreuses modifications ont été apportées, notamment via des amendements du rapporteur et du gouvernement. Sur les 690 amendements déposés, 207 ont été adoptés dont 45 du gouvernement. L’un d’entre eux autorise les mutualisations de fonctions support entre établissements publics. Des suppressions de commissions consultatives ont également été rétablies.
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La ministre de la Transformation et de la Fonction publiques Amélie de Montchalin a défendu en commission spéciale de l'Assemblée nationale, le 14 septembre 2020, les deux premiers titres du projet de loi Asap. © Assemblée nationale (capture d''écran)
Présenté en Conseil des ministres en février 2020, le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, qui fait l’objet d’une procédure accélérée, avait été adopté en première lecture par le Sénat le 5 mars (lire sur AEF info). Après avoir été stoppé en raison de la crise sanitaire, son examen a repris en commission spéciale à l’Assemblée nationale le 14 septembre pour s’achever jeudi 17 septembre en fin de journée, à l’issue de 23 heures de débat.
Ce texte, passé de 50 à 85 articles lors de son examen au Sénat, a pour objectif d'"accélérer la dynamique en matière de simplification et d’efficacité administrative à travers plusieurs mesures très concrètes, visant à rapprocher les Français de leurs services publics et à libérer leurs énergies" (lire sur AEF info). Par conséquent, il comporte une série de mesures tous azimuts – dont certaines avaient été annoncées lors du CITP du 15 novembre 2019 (lire sur AEF info) – visant à simplifier les démarches administratives dans de nombreux secteurs (santé, éducation, culture, économie, développement durable, logement…) et à alléger l’appareil d’État via notamment la suppression de commissions consultatives. Son examen à l’Assemblée nationale en commission spéciale l’a encore complété, 207 amendements (sur les 690 déposés) ayant été adoptés, dont 45 du gouvernent et 101 du rapporteur Guillaume Kasbarian (LaREM, Eure-et-Loire).
Les agents responsables de la simplification
Pour rappel, les cinq titres du projet de loi portent respectivement sur la suppression des commissions administratives, la déconcentration des décisions administratives individuelles, la simplification des procédures applicables aux entreprises, diverses dispositions de simplification, et des dispositions de suppression sur transposition de directives européennes, les deux premiers étant portés par la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques.
"Ces travaux portent aujourd’hui une acuité particulière tant la crise sanitaire que nous connaissons a de nouveau révélé le besoin de simplifier l’action publique. La relance de notre économie va demander impérieusement d’amplifier cette action puisqu’il n’y aura pas de plan de relance efficace s’il n’y a pas de transformation de l’action publique. Il est de ma responsabilité première de traduire concrètement et au plus vite ces engagements", a insisté Amélie de Montchalin rappelant que l’une des priorités de sa feuille de route est bien la simplification de l’action publique et évoquant des initiatives à venir autres que ce projet de loi.
Objectif de ce "plan de simplification" : "Infuser toute l’action publique pour que cela se traduise concrètement dans le quotidien des citoyens et des agents publics qui eux aussi demandent instamment une simplification des procédures qu’ils ont à déployer." À cet égard, la ministre a souligné la nécessité d’un déploiement global et d’un portage par chaque ministère, chaque agent public, chaque administration, chaque agent étant "responsable d’une certaine manière, de cette simplification".
Plusieurs suppressions de commission rétablies
Lors de l’examen du premier titre, le 14 septembre, les députés ont rétabli plusieurs suppressions et regroupements de commissions et d’entités rattachées aux administrations centrales que le Sénat avait décidé de repêcher. Ces suppressions visent en effet à "libérer du temps pour que les agents publics puissent se concentrer sur des missions prioritaires pour les Français", a indiqué la ministre rappelant la suppression de 86 commissions sur 394 (une cinquantaine ayant été déjà supprimées avant le projet de loi.
"Cela permettra de fluidifier de manière significative le processus de la décision publique", a-t-elle commenté, ajoutant que si le texte traite de la partie législative, son ministère "assure un suivi très régulier de la suppression des commissions administratives qui relèvent, elles, du domaine réglementaire". Soulignant la nécessité de garder la cohérence d’ensemble du projet de loi, elle a annoncé que le gouvernement porterait "le rétablissement du texte initial". La suppression de plusieurs structures a donc été rétablie.
Sont notamment concernés le conseil supérieur de la mutualité (amendement n° 559), l’observatoire de la récidive et de la désistance (amendement n° 688), la commission nationale d’évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base (n° 691), l’observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement (n° 391), la commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires (n° 691), le conseil national des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (n° 617) ou encore la commission scientifique nationale des collections (n° 690).
Ont également été ajoutés des suppressions telles celles de la commission supérieure du numérique et des postes (amendement n° 483), de l’institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (n° 689) A noter que pour les missions de la plupart de ces instances supprimées seront reprises par les ministères concernés. Par ailleurs, sur un amendement du rapporteur, le HCDS (Haut Conseil du dialogue social) a été exclu de la liste des instances ayant vocation à être absorbées par la CNNCEFP (commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle) (lire sur AEF info). Interrogée sur les enjeux de suppression de postes de fonctionnaires que pourrait porter le projet de loi via ces disparitions de commissions, la ministre a rappelé la décision du gouvernement de maintenir une stabilité des effectifs de l’État pour 2021 (lire sur AEF info).
Mutualisations : "favoriser un partage de compétences"
Le titre II du projet de loi sur la déconcentration des décisions administratives individuelles (articles 17 à 20) ambitionne de rendre les administrations plus proches et plus accessibles. Cela passe par la relocalisation de certaines d’entre elles hors de Paris et des grandes métropoles, notamment via le réseau France Services. Cela passe aussi par de la déconcentration de la prise de décision, et c’est tout l’objet du titre II, a réexpliqué Amélie de Montchalin, rappelant l’objectif de déconcentrer 99 % des décisions individuelles. Ces mesures de déconcentration concernent essentiellement les domaines de la culture et de la santé (laboratoires).
Mais le gouvernement a profité de cet examen en commission pour intégrer au titre II un nouvel article après l’article 19 qui complète certes une mesure "santé" (l’article 19 permet de confier à une seule ARS l’exercice de compétences normalement exercées par toutes les ARS) mais dont le champ d’action est plus que ce seul domaine. Son amendement n° 619 autorise en effet, de "façon facultative, la mutualisation de fonctions support entre établissements publics (qu’ils soient administratifs – EPA – ou industriels et commerciaux – Epic) conduisant, dans des champs géographiques distincts, des missions de nature similaire et de déroger ainsi au principe de spécialité, de rang législatif".
"La faculté de mutualisation introduite par le présent amendement est de nature à favoriser un partage des compétences, des moyens et de l’expertise dans un cadre budgétaire contraint, mais également à fluidifier l’exercice des fonctions support et à permettre une meilleure coordination des activités entre les établissements publics concernés", explique l’exposé des motifs. Cette mutualisation se limiterait cependant aux établissements exerçant des missions "similaires". "Il est en effet apparu que la mesure pourrait être utilement mise à profit par des établissements jumeaux ou voisins intervenant dans des champs géographiques différents comme les agences de l’eau, les parcs nationaux, les établissements publics fonciers et les établissements publics d’aménagement (EPA) mais aussi les ports maritimes", défend le gouvernement.
… "et bénéficier de gains de productivité"
"Plusieurs établissements publics administratifs pourront, par exemple, créer une fonction support commune pour bénéficier de gains de productivité ou mutualiser des services qu’il serait plus intéressant d’avoir en commun. On pourra simplifier les règles de fonctionnement au sein des administrations, notamment afin de gagner en productivité et peut-être aussi en expertise pour certaines fonctions support très techniques", a illustré Amélie de Montchalin en commission spéciale.
Cet amendement a suscité quelques critiques, Émilie Cariou (EDS, Meuse) pointant notamment l’absence d’étude d’impact. "On pourrait faire ce qu’on veut au sein des administrations, n’importe où en France", a-t-elle réagi point le caractère très large de l’expression "fonctions support". Le député LFI du Nord Ugo Bernalicis a de son côté reproché au gouvernement de vouloir "encore réaliser des économies de bouts de chandelle, en éloignant des fonctions support des territoires, ce qui conduit à des aberrations". "On l’a vu avec la gestion de la paie au niveau de l’État : on a voulu tout concentrer, tout mutualiser, puis on s’est rendu compte qu’il fallait quand même garder un peu de liens avec les gens, sur leur lieu de travail", a-t-il ajouté.
Pour le gouvernement, il ne s’agit nullement de reconcentrer, a assuré Amélie de Montchalin. "Nous ne reconcentrerons rien. Nous dirons à des structures territorialisées similaires qu’elles pourront, si elles le souhaitent, mettre en commun des ressources. […] Juridiquement, le principe de spécialité ne permet pas aux fonctions support de ces organismes d’être mutualisées. Chacun doit travailler chez soi. On voit bien l’intérêt qu’il peut y avoir, pour certaines structures, à mutualiser des fonctions. Il n’y aura pas de reprise en main puisque l’État central n’est en rien lié à de telles initiatives : ce sont les organismes concernés qui pourront mettre en commun des ressources", a-t-elle développé. Quant aux éventuels "doutes sur la constitutionnalité et la légalité du dispositif", elle a renvoyé au Conseil d’État qui devra valider le décret qui précisera les conditions d’application de cette mesure.
Le projet de loi Asap sera examiné en séance publique par les députés du 28 septembre au 2 octobre prochains.
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Clarisse Jay,
journaliste