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Le problème de la consommation de masques jetables qui se retrouvent sur les voies publiques "n’est que la face émergée de l’iceberg", craint Flore Berlingen. Dans un entretien à AEF info, mardi 26 mai 2020, et à l'instar de Brune Poirson qui déplore "l’opportunisme épidémique" des industriels du plastique, la directrice de Zero Waste France dénonce "le retour" des bouteilles en plastique, des suremballages, des gants en plastique, des lingettes, quelques mois après la publication de la loi antigaspillage pour une économie circulaire. Elle demande aux entreprises et administrations de "questionner" leur "automatisme 'jetable = propre'", qui fait "l’impasse totale sur les enjeux environnementaux et sanitaires" de la production de plastique.
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Flore Berlingen, directrice de l'ONG Zero Waste, fustige le retour du tout jetable
AEF info : Quel bilan faites-vous de l’impact de la pandémie sur la production de déchets ?
Flore Berlingen : Il est encore impossible de dresser un bilan chiffré, du fait de manque de données. Mais on peut penser que le problème des masques, beaucoup mis en avant, n’est que la face émergée de l’iceberg. Ce qui nous préoccupe, c’est le recours au plastique à usage unique, et pas uniquement dans le secteur médical. Avec le retour des bouteilles, des suremballages, des gants alors qu’ils ne sont pas recommandés, des lingettes qui, en se retrouvant dans les canalisations et les usines de traitement, sont une calamité environnementale. C’est un nouvel automatisme qui s’est réactivé pour calmer les peurs.
Or les lobbies, dès les premiers jours de la pandémie, ont avancé leurs pions. Le secteur du plastique et celui de l’agroalimentaire ont recyclé l’argumentaire de l’hygiène utilisé depuis le début de l’ère du jetable : c’est jetable donc c’est plus propre. Cela a un effet de surproduction des déchets à court terme. Mais aussi à plus long terme, en reculant sur les avancées obtenues ces dernières en matière d’économie circulaire, comme la fin du plastique à usage unique en 2040. Elles n’étaient pas suffisantes mais elles étaient importantes.
AEF info : Que répondez-vous à l’argumentaire hygiénique ? Quelles solutions préconisez-vous ?
Flore Berlingen : Ce discours fait l’impasse sur l’impact environnemental et sanitaire du tout jetable et de la production de plastique qu’elle suppose. Cela semble abstrait comme cela, mais début mai, un accident dans une usine de fabrication de polystyrène a fait au moins onze morts en Inde. Les produits qui arrivent dans nos magasins ont l’air propre, mais ils ont été fabriqués dans des usines polluantes.
D’un côté, il y a les lobbies, à l’autre extrémité, des choix individuels d’achats de produits jetables. Entre les deux, il y a des entreprises, des administrations qui préfèrent passer une énième commande de gobelets et de bouteilles en plastique pour rassurer tout le monde. En donnant l’impression qu’il est dangereux de remplir son verre d’eau !
Il me semble important que les entreprises questionnent cet automatisme "jetable = propre", brisent les tabous. Elles sont soumises à beaucoup de stress, je le reconnais. Mais faire l’impasse totale sur les enjeux environnementaux et sanitaires est un mauvais calcul.
AEF info : Le gouvernement a-t-il tenu le bon discours selon vous ?
Flore Berlingen : Le gouvernement a lancé un message clair : le jetable n’est pas indispensable. C’est bien que ce soit dit. Mais certaines fiches conseils du ministère du Travail pour aider les salariés et les employeurs dans la mise en œuvre des mesures de protection contre le Covid-19 sur les lieux de travail recommandent l’usage de lingettes désinfectantes. Or, il y a une tendance à surinterpréter les textes, et à considérer ces mesures comme obligatoires.
"Ça fait plusieurs semaines que je m’époumone à dire, avec quelques ONG : attention ! attention ! Retour massif du plastique à usage unique", a déclaré Brune Poirson, secrétaire d'État à la Transition écologique, le 26 mai sur l’antenne de RTL. "La consommation explose. Pourquoi ? Parce qu’on a des lobbies", dénonce celle qui a en charge le dossier de l’économie circulaire. Ils reprennent "les vieilles recettes" consistant à "faire l’amalgame entre le plastique médical et le plastique de consommation quotidienne" et à "tordre" les résultats des études scientifiques.
"Je suis soutenue mais on ne l’est jamais assez dans ce type de combat culturel" face aux industriels du plastique qui font de "l’opportunisme épidémique", ajoute Brune Poirson,
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Claire Avignon,
journaliste