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L’interdiction faite à une salariée musulmane de porter un voile, prévue par le règlement général d’une entreprise interdisant les signes politiques, philosophiques et religieux visibles sur le lieu de travail, peut être admise si elle ne repose pas sur des stéréotypes ou des préjugés relatifs à une religion ou aux convictions religieuses en général. Elle peut être justifiée pour mettre en œuvre dans l’entreprise une politique de neutralité en matière de religion et de convictions fixée par l’employeur, pour autant que le principe de proportionnalité soit respecté. Peuvent être pris en compte à cet égard la taille et le caractère ostentatoire du signe religieux, la nature de l’activité exercée et son contexte, ainsi que l’identité nationale de l’État concerné. C’est ce que propose le 31 mai 2016 l’avocat général de la CJUE dans une affaire belge. Ses conclusions ne lient pas la Cour.
Le licenciement disciplinaire d’une conseillère de clientèle musulmane en raison de son insistance à porter le voile à son retour de congé parental est discriminatoire, dès lors que l’employeur invoque à l’appui de cette différence de traitement un simple "risque" de tensions avec la clientèle, et non des problèmes relationnels existants constitutifs d’un trouble dans l’entreprise, et qu’il ne justifie pas par des raisons objectives son refus d’offrir à la salariée, ainsi qu’elle le proposait, un poste sans contact avec la clientèle. C’est ce que juge la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 25 novembre 2015. Les juges d’appel constatent la nullité du licenciement d’une salariée de la banque LCL.
La CEDH juge le 26 novembre 2015 que le non-renouvellement du contrat d’une assistante sociale employée dans un établissement public de soins psychiatriques, au motif qu’elle refuse d’enlever son voile, n’est pas contraire à la convention européenne des droits de l’homme. La Cour valide ainsi la conception française de la laïcité issue du principe de neutralité de l’État, énoncée par la Constitution et par le Conseil d’État, qui interdit aux agents publics de manifester leurs croyances religieuses dans l’exercice de leurs fonctions. Les autorités françaises "n’ont pas outrepassé leur marge d’appréciation en constatant l’absence de conciliation possible entre les convictions religieuses" de la requérante "et l’obligation de s’abstenir de les manifester, ainsi qu’en décidant de faire primer l’exigence de neutralité et d’impartialité de l’État", résume un communiqué de la CEDH.
La cour d’appel de Paris a jugé fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute d’une consultante informatique pour avoir refusé de retirer son foulard islamique chez un client. Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation décide le 9 avril 2015 d’envoyer à la CJUE une question préjudicielle. Elle souhaite savoir si le souhait d’un client d’une société de conseil de ne plus avoir de consultante voilée constitue une "exigence professionnelle essentielle et déterminante, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice" pouvant, selon la directive sur l’égalité de traitement, justifier une discrimination fondée sur les convictions religieuses.
Le conseil de prud’hommes de Lyon juge sans cause réelle et sérieuse le licenciement par un hypermarché Carrefour d’une caissière qui refuse de retirer son foulard alors que le règlement intérieur proscrit les signes religieux. Le conseil estime notamment que les sondages d’opinion mis en avant par Carrefour pour démontrer une antipathie du public à l’égard du voile "ne caractérisent pas un risque pour les intérêts financiers de la société". Il souligne à cet égard que Carrefour "intègre dans sa politique commerciale une publicité abondante ciblée" sur des produits "relevant de pratiques alimentaires" musulmanes, notamment au moment du Ramadan. Les juges ne retiennent pas la discrimination, estimant que la salariée n’a pas été licenciée au motif de ses convictions religieuses mais en raison du port d’un signe manifestant son appartenance religieuse et contraire au règlement intérieur.
Les principes de neutralité et de laïcité du service public sont applicables à l'ensemble des services publics, y compris lorsque ceux-ci sont assurés par des organismes de droit privé. C'est ce que retient pour la première fois la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 19 mars 2013 (n°12-11.690) concernant une salariée travaillant comme « technicienne de prestations maladie » de la Cpam (Caisse primaire d'assurance maladie) de Seine-Saint-Denis. Dans un second arrêt du même jour concernant la crèche Baby-Loup (n° 11-28.845), la haute juridiction rappelle en revanche que, « s'agissant d'une crèche privée, qui ne peut dès lors, en dépit de sa mission d'intérêt général, être considérée comme une personne privée gérant un service public, […] le principe de laïcité instauré par l'article 1er de la Constitution n'est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public. Le principe de laïcité ne peut dès lors être invoqué pour priver ces salariés de la protection que leur assurent les dispositions du code du travail ».