En plus des cookies strictement nécessaires au fonctionnement du site, le groupe AEF info et ses partenaires utilisent des cookies ou des technologies similaires nécessitant votre consentement.
Avant de continuer votre navigation sur ce site, nous vous proposons de choisir les fonctionnalités dont vous souhaitez bénéficier ou non :
La loi renseignement "laisse subsister des déceptions que la pratique ne pourra entièrement effacer". C’est ce qu’indique Jean-Marie Delarue, président de la CNCIS (Commission nationale des interceptions de sécurité) dans le 23e et dernier rapport d’activité 2014-2015 de l’autorité, publié le 22 juillet 2015 après avoir été remis au Premier ministre le 15 juillet 2015. Amenée à être remplacée par la CNCTR (Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement) dans le cadre de la loi relative au renseignement, promulguée le 26 juillet 2015 (lire sur AEF), la commission fait part de plusieurs craintes dans son dernier rapport. En particulier, elle émet des observations sur les nouveaux dispositifs mis en œuvre à compter du 1er janvier 2015, notamment le recueil de données de connexion et de "géolocalisation en temps réel".
Cette dépêche est en accès libre.
Retrouvez tous nos contenus sur la même thématique.
Dans son rapport d’activité portant sur l’année 2014 et le début de l’année 2015, la CNCIS, dont la mission principale est de "veiller à la légalité des opérations d’interceptions de sécurité et de recueil de données techniques de communication pratiquées sur le territoire national", s’inquiète d’un "affaiblissement des contrôles" induit par la loi relative au renseignement.
LES TECHNOLOGIES INTRUSIVES, UN MARCHÉ AVEC "DES ACTEURS PUISSANTS"
Elle pointe notamment la légalisation de "certaines techniques autorisées" : "La sophistication des technologies intrusives, dont la fabrication génère un marché où interviennent des acteurs puissants, contraint le contrôleur, demain, à s’adapter", estime la commission. Elle souligne également les dangers de "l’élargissement du nombre de personnes susceptibles d’être concernées par la surveillance administrative". "On voit ainsi apparaître dans la nouvelle loi la notion cruciale 'd’entourage'", indique la commission, qui regrette que cette extension "n’ait fourni aucune estimation sur le volume d’emploi des techniques légalisées". "Cette lacune n’a pas été suffisamment relevée par les parlementaires."
La troisième principale critique de la CNCIS relative à la loi renseignement concerne "la matière de ce qui doit être contrôlé". "Seul l’examen de l’inégalité des données recueillies en temps réel est garant d’un contrôle efficace", indique la commission. "Ce n’est que dans les ultimes versions du texte qu’est apparue l’exigence d’un examen 'permanent, complet et direct' des données par la commission, à quoi est ajouté le terme 'immédiat' pour les seules interceptions de sécurité et données de connexion."
LA CNCTR, UNE CONSTRUCTION "LONGUE ET COMPLEXE"
La CNCIS s’interroge également sur les difficultés que va rencontrer la future commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. "Elle aura à maîtriser des dispositifs complexes", tels que les algorithmes, les IMSI catcher, les balises… Elle nécessite "des matériels capables de faire état de l’ensemble des données recueillies, d’un 'langage' numérique uniforme, des réseaux sécurisés capables d’acheminer les données, et des garanties de secret". La CNCIS a donc demandé "que la CNCTR ait le contrôle de l’ensemble des dispositifs utilisés pour connaître quelles sont les données qu’ils étaient susceptibles de rassembler. Son succès en la matière a été mitigé."
La CNCIS alerte en outre sur une construction "complexe, longue et coûteuse". "Selon les choix techniques opérés et le budget déployé, les résultats peuvent être très différents, en particulier sur la réalité d’un contrôle a posteriori."
Par ailleurs, le député Jean-Jacques Urvoas (PS, Finistère), président de la commission des Lois de l’Assemblée nationale et membre de la CNCIS, indique, dans sa contribution personnelle jointe au rapport, s’opposer à la présence de parlementaires dans la future CNCTR. "Dans les faits comme en droit, le contrôle externe de responsabilité des services, qui relève de la seule responsabilité du Parlement, est maintenant possible. Quel intérêt dès lors de maintenir une présence parlementaire dans la future Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement ?".
DES AVIS DE MOINS EN MOINS SUIVIS
S’agissant des quatre premiers mois de 2015, la CNCIS indique que "le début de l’année est naturellement marqué par les attentats qui ont endeuillé le pays et la permanence d’une menace forte". "En avril, le Premier ministre a annoncé une augmentation du quota d’interceptions de sécurité, passé de 2 190 à 2 700 (+ 23 %)." La CNCIS explique que l’activité de la commission a ainsi été affectée d’une part, "par un surcroît sensible d’activité", et d’autre part, "par les outils nouveaux mis à disposition des services". En effet, "la loi de programmation militaire de 2013 autorise les services à adresser des demandes pour obtenir des données téléphoniques relatives à la géolocalisation en temps réel". "Durant les quatre premiers mois de 2015, 252 mesures ont été demandées à ce titre."
De la même manière, depuis les attentats de janvier 2015, "la part relative à la prévention du terrorisme dans les interceptions de sécurité a augmenté de huit points", passant de 28 % à 36 % sur les quatre premiers mois de 2015. La commission juge cependant "préoccupant" que "la part des avis défavorables qui n’ont pas été suivis par le Premier ministre s’est accrue nettement plus substantiellement". Sur cette période, sur 32 avis défavorables formulés par la CNCIS sur les 2509 demandes présentées, 9 n’ont pas été suivis, soit "plus du quart d’entre eux", et déjà plus, en valeur absolue, que sur l’ensemble de l’année 2014. La commission alerte également sur "deux recommandations adressées au Premier ministre, qui n’ont pas été suivies d’effets en 2014" : "cette manière de faire est inédite depuis 1991", souligne la CNCIS.
La loi relative au renseignement est publiée au Journal officiel, dimanche 26 juillet 2015. Présenté en conseil des ministres en avril 2015 (lire sur AEF), le texte été définitivement adopté par le Parlement le 24 juin 2015 (lire sur AEF). Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision le 23 juillet 2015 (lire sur AEF).
Le législateur "pourrait se poser la question" de fusionner la future CNCTR (commission nationale de contrôle des techniques de renseignement) avec le Défenseur des droits, estime Jacques Toubon, mercredi 1er juillet 2015. Interrogé par le rapporteur de la commission d'enquête du Sénat sur les autorités administratives indépendantes, Jacques Mézard (Cantal, RDSE) sur la fusion du Défenseur des droits avec d'autres institutions de ce type, il indique par ailleurs ne pas avoir "de revendications" concernant une éventuelle intégration du CGLPL dans le Défenseur des droits. "Je laisse le soin aux autorités politiques et au législateur d'en décider, s'ils le veulent." Pour sa part, Adeline Hazan estime que cette intégration n'est pas souhaitable.
Les demandes d’accès aux données techniques de communication par les services de police et de gendarmerie chargés de la lutte contre le terrorisme sont en "forte hausse" pour l’année 2014. Selon un bilan provisoire, leur nombre "pourrait dépasser 100 000" (contre 36 712 en 2013). Environ 90 % de ces demandes portaient uniquement sur l’identification du titulaire d’un numéro et "seulement 10 %" sur le "détail de trafic". C’est ce qu’indique la CNCIS (Commission nationale des interceptions de sécurité) dans un communiqué publié à l’occasion de la remise de son rapport d’activité au Premier ministre, jeudi 22 janvier 2015. Le rapport en lui-même porte uniquement sur les interceptions de sécurité réalisées par les services en 2013. En baisse en 2012 (lire sur AEF), les réquisitions de données techniques de connexion et les interceptions de sécurité sont reparties à la hausse en 2013.
Le "dispositif actuel" de contrôle des interceptions de sécurité "est insuffisant", affirme Jean-Marie Delarue, président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, lors d'une audition par la commission de réflexion sur les "droits et libertés à l’âge numérique" de l’Assemblée nationale, jeudi 13 novembre 2014 (lire sur AEF). "Je pense que l’évolution de la loi est nécessaire", ajoute-t-il. Pour le député Jean-Jacques Urvoas, président de la délégation parlementaire au renseignement et membre de CNCIS, le champ d’action de cette dernière est "trop restrictif".
Vous souhaitez contacter
Amandine Sanial,
journaliste