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Franck Morel, avocat associé au sein du cabinet Barthélémy avocats, ancien directeur adjoint de cabinet du ministre du Travail, répond aux questions d'AEF sur les conséquences de la modification de la position de la Cour de cassation, le 27 janvier 2015, sur la validité des avantages catégoriels prévus par un accord collectif au regard du principe d’égalité de traitement (lire sur AEF). "Cette évolution questionne la pertinence du caractère trop général de ce principe général prétorien d’égalité de traitement", estime-t-il. "Cette histoire renforce la nécessité pour le juge de devoir procéder à des études d’impact, comme doit le faire législateur depuis 2009". Il s’interroge enfin sur la notion de catégorie professionnelle. Dans une seconde interview, publiée demain, Franck Morel analyse l’impact de cet arrêt sur le dialogue social en France.
Les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions ou d’accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées. Dès lors, il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle. Tel est le revirement de jurisprudence opéré par la Cour de cassation dans un arrêt du 27 janvier 2015 qui fait l’objet d’un communiqué publié sur son site internet.
Dans un arrêt du 24 septembre 2014, la Cour de cassation juge justifiées au regard du principe d’égalité de traitement les dispositions de la convention collective des établissements hospitaliers privés à but non lucratif du 31 octobre 1951, qui prévoit un calcul de l’indemnité de licenciement plus favorable pour les cadres dirigeants que pour les autres cadres. En effet, dans le contexte de la gestion des établissements, "les cadres dirigeants, qui ont la responsabilité directe de la mise en œuvre du projet associatif, sont plus exposés que les autres salariés au licenciement, comme directement soumis aux aléas de l’évolution de la politique de la direction générale". Cette différence de traitement prenant en compte "les spécificités de la situation des cadres dirigeants liées aux conditions d’exercice de leurs fonctions et à l’évolution de leur carrière" est, dès lors, justifiée.
Une convention collective peut prévoir un mode d'attribution d'une prime plus avantageux pour les non cadres que pour les cadres. Cette différence de traitement doit cependant être justifiées par les spécificités ou les contraintes propres aux fonctions de chacune des catégories professionnelles. En conséquence, une cour d'appel ne peut considérer que la différence d'attribution de cette prime apparaît fondée sur des raisons objectives aux motifs que chacune des catégories professionnelles bénéficie d'avantages propres et que les partenaires sociaux ont tenu compte, pour établir les conditions d'octroi, du fait que chaque catégorie bénéficie d'une formation différente et occupe des fonctions spécifiques. C'est ce que juge la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 27 novembre 2013.
L'octroi aux cadres d'un supplément de congés payés par un accord d'entreprise, de même que le bénéfice d'une indemnité de licenciement plus favorable que celle réservée aux personnels non cadres par la convention collective de la métallurgie, sont justifiés au regard du principe d'égalité de traitement, dès lors que cette différence de traitement a pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de la situation de cette catégorie de salariés, tenant notamment aux conditions d'exercice des fonctions, à l'évolution de carrière ou aux modalités de rémunération. C'est ce que juge la Cour de cassation dans deux arrêts du 28 mars 2012. La Cour de cassation conforte ainsi la position qu'elle a adoptée dans ses arrêts du 8 juin 2011 (AEF n° 238973).
La chambre sociale de la Cour de cassation précise les conditions de mise en œuvre du principe « à travail égal, salaire égal » lorsque l'inégalité de traitement prétendue repose sur des stipulations conventionnelles, par deux arrêts rendus mercredi 8 juin 2011. D'une part, « la seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement, résultant d'un accord collectif, entre les salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ». D'autre part, « repose sur une raison objective et pertinente la stipulation d'un accord collectif qui fonde une différence de traitement sur une différence de catégorie professionnelle, dès lors que cette différence de traitement a pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de la situation des salariés relevant d'une catégorie déterminée, tenant notamment aux conditions d'exercice des fonctions, à l'évolution de carrière ou aux modalités de rémunération ».