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« Le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation ont décidé que le système actuel de garde à vue n'était pas conforme à notre corpus constitutionnel et ils ont sagement donné au Parlement jusqu'au 1er juillet 2011 pour mettre en place un nouveau système qui lui sera conforme à la Constitution » (AEF Sécurité globale n°257713), indique le ministre de la Justice Michel Mercier, lors du congrès de l'Union syndicale des magistrats à Rennes, vendredi 19 novembre 2010. « Il faut laisser au Parlement le temps du débat, nous allons commencer vers le 15 décembre la discussion de la loi modifiant la garde à vue », affirme-t-il.
Le Saf (syndicat des avocats de France) souhaite « convaincre que la mission de l'avocat commence au stade de l'enquête », avant « juillet 2011 » et le vote de la loi sur la réforme de la garde à vue. Dans son rapport moral rédigé à la suite de son congrès du syndicat à Bobigny du 11 au 13 novembre 2010, le syndicat souligne que « 97 % des procédures » s'instruisent pendant l'enquête. « Nous ne pouvons pas envisager d'être témoins muets d'une scène policière que notre présence cautionne et valide », écrit le président du Saf, Jean-Louis Borie. Il indique que les membres du syndicat rédigent actuellement des amendements qu'ils remettront au ministre de la Justice « sans grandes illusions, mais qui nous seront, de toute façon, utiles dans nos actions de lobbying de demain ou d'après-demain ».
La chambre criminelle de la Cour de cassation juge dans trois arrêts du 19 octobre 2010 que « certaines règles actuelles de la garde à vue ne [satisfont] pas aux exigences de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme telles qu'interprétées par la Cour européenne ». Pour être conformes à ces exigences, les gardes à vue doivent être menées dans le respect des principes suivants, selon la Cour de cassation : « la restriction au droit, pour une personne gardée à vue, d'être assistée dès le début de la mesure par un avocat, en application de l'article 706-88 du code de procédure pénale instituant un régime spécial à certaines infractions, doit répondre à l'exigence d'une raison impérieuse, laquelle ne peut découler de la seule nature de l'infraction ; la personne gardée à vue doit être informée de son droit de garder le silence ; la personne gardée à vue doit bénéficier de l'assistance d'un avocat dans des conditions lui permettant d'organiser sa défense et de préparer avec lui ses interrogatoires, auxquels l'avocat doit pouvoir participer ».
La Cour européenne des droits de l'homme condamne la France et rappelle « l'importance du droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination et de celui de garder le silence, qui sont des normes internationales généralement reconnues, au coeur de la notion de procès équitable », dans un arrêt « Brusco contre France », rendu jeudi 14 octobre 2010. La France devra verser 5 000 euros d'amende pour dommage moral et 7 000 euros pour « frais et dépens » à Claude Brusco, qui avait saisi la Cour en 2006 à la suite d'une garde à vue le 7 juin 1999. Il se plaignait notamment d'avoir « été obligé de prêter serment avant son interrogatoire », pensant alors être entendu en tant que témoin et non placé en garde à vue, et « d'avoir été privé du droit de se taire, et de ne pas s'autoincriminer ». La Cour constate qu'il n'a « pas été informé au début de son interrogatoire du droit de se taire, de ne pas répondre aux questions posées, ou encore de ne répondre qu'aux questions qu'il souhaitait ». Elle estime que « le fait d'avoir dû prêter serment avant de répondre aux questions de la police a constitué une forme de pression sur l'intéressé ».
Le projet de loi relatif à la garde à vue « vise à réduire le recours à la garde à vue et à améliorer les droits des personnes qui en font l'objet, sous le contrôle renforcé du procureur de la République », affirme la ministre de la Justice lors de la présentation du texte en conseil des ministres, mercredi 13 octobre 2010 (AEF Sécurité globale n°261158). Michèle Alliot-Marie rappelle que ce projet de loi « constitue le premier volet de la réforme de la procédure pénale engagée à l'automne dernier » et qu'il « tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010 » qui a déclaré le régime des gardes à vue de droit commun contraire à la Constitution (AEF Sécurité globale n°262897). Le texte affirme ainsi le principe « selon lequel la seule nécessité d'entendre une personne suspectée au cours d'une enquête n'impose pas son placement en garde à vue ». Il fixe « le cadre juridique d'une audition libre, s'agissant notamment du recueil du consentement de la personne à être librement entendue », précise-t-elle.
Le Conseil constitutionnel déclare cinq articles du code de procédure pénale relatifs à la garde à vue contraires à la Constitution dans une décision du 30 juillet 2010. « Compte tenu des évolutions survenues depuis près de vingt ans, les dispositions attaquées n'instituent pas les garanties appropriées à l'utilisation qui est faite de la garde à vue », indique le Conseil dans une note explicative qui accompagne la décision. Cette dernière invalide les articles 62, 63, 63-1 et 77 du CPP (code de procédure pénale) et les alinéas 1er à 6 de son article 63-4. Cette décision requiert la modification des conditions d'intervention de l'avocat lors de la garde à vue. « La conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infraction et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties ne peut plus être regardée comme équilibrée », juge le Conseil.