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Le comportement de l'agent public auquel il est reproché d'avoir exercé des agissements de harcèlement moral ne peut être apprécié sans tenir compte de l'attitude de la personne qui estime avoir été victime de harcèlement moral. En l'occurrence, une adjointe administrative ne peut être reconnue victime d'un harcèlement moral de la part d'une secrétaire générale de mairie, même si les faits produits par l'intéressée sont susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement, dès lors que son comportement a largement contribué à la dégradation des conditions de travail dont elle se plaint, considère le Conseil d'État dans une décision du 11 juillet 2011 publiée au recueil Lebon.
« Lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. » C'est la nouvelle formulation de ses exigences en matière d'établissement de la preuve du harcèlement moral qu'utilise la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 25 janvier 2011 qui sera mentionné dans le rapport annuel de la Cour. Dans le même arrêt, la haute juridiction précise que, « dès lors que le salarié informe son employeur de son classement en invalidité deuxième catégorie sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail, il appartient à celui-ci de prendre l'initiative de faire procéder à une visite de reprise, laquelle met fin à la suspension du contrat de travail ».
La chambre sociale de la Cour de cassation a rendu en quelques mois plusieurs arrêts, non publiés au bulletin, qui donnent de précieuses indications sur ce qu'elle entend par « éléments pouvant laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral ». « Ces arrêts sont un message fort pour les cours d'appel », soulignent Agnès Cloarec-Mérendon et Coline Bied-Charreton, avocates au cabinet Latham & Watkins, lors d'une conférence sur les risques psychosociaux, jeudi 27 janvier 2011, à Paris. La Cour de cassation les incite ainsi à donner toute son effectivité au régime spécifique de la preuve instauré en matière de harcèlement moral par l'article L. 1154-1 du code du travail.
Si, en matière de harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner les agissements incriminés et d'apprécier s'ils étaient ou non constitutifs, par leur objet ou leurs effets, d'un tel harcèlement moral, il ne peut « déduire des seules qualités et compétences professionnelles » d'un salarié, attestées par des témoignages, « mais dont l'objet était dépourvu de tout lien avec le grief de harcèlement moral, que la matérialité et la gravité des faits reprochés n'étaient pas établies ». C'est ce que décide le Conseil d'État dans un arrêt du 23 juillet 2010, inédit au recueil Lebon, concernant une salariée protégée.
Le fait pour un maire d'adresser à un employé municipal des « lettres récapitulant tous les griefs formulés sur son travail et son comportement », d'envoyer « chaque jour ses instructions par voie écrite », de refuser plusieurs demandes de stage, de lui infliger un blâme « pour des faits de vol de bois, alors que ces faits ont donné lieu à un classement sans suite par le parquet » et d'afficher les procès-verbaux des séances du conseil municipal, au cours duquel le maire a mis en cause publiquement le comportement professionnel et personnel du fonctionnaire, peuvent relever « de l'exercice normal de l'autorité hiérarchique ou du pouvoir disciplinaire et ne sont pas constitutifs de harcèlement moral », décide le Conseil d'État dans un arrêt du 7 juillet 2010.
« Des agissements répétés de harcèlement moral [sont] de ceux qui [peuvent] permettre à l'agent public qui en est l'objet d'obtenir la protection fonctionnelle prévue par les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont les fonctionnaires et les agents publics non titulaires pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions. » C'est ce qu'affirme pour la première fois le Conseil d'État dans une décision du 12 mars 2010. Cette décision implique que le harcèlement moral fait bien partie des attaques visées par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983.